TISA, une menace pour l’éducation publique gratuite de qualité
L’IE a envoyé une note d’information sur l’Accord sur le commerce des services (ACS) à ses affiliés, les alertant sur ces négociations commerciales qui menacent de libéraliser des services publics tels que les soins de santé et l'éducation.
L'ACS est un ensemble de négociations entreprises par certains membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) visant à libéraliser davantage le commerce des services. Initialement proposé par les Etats-Unis et l'Australie début 2012, l'ACS est né en réponse à l'impasse dans laquelle se trouvent en permanence les négociations commerciales de l'OMC, et notamment les débats visant à élargir l'Accord général sur le commerce des services (AGCS).
Les négociations officielles ont été lancées début 2013 et les participants prévoient de parvenir à un accord en 2014. Depuis juin 2013, les participants aux négociations de l'ACS sont les suivants: l'Australie, le Canada, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, les États-Unis, Hong Kong, l'Islande, Israël, le Japon, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, le Pakistan, le Panama, le Paraguay, le Pérou, la République de Corée, la Suisse, le Taipei chinois (Taïwan), la Turquie et l'Union européenne .
L’enseignement public potentiellement couvert par TISA
L'ACS se présente comme un accord exhaustif n'excluant d'emblée aucun secteur des services. Tous les secteurs des services pourraient dès lors être couverts par cet accord, y compris les services publics tels que les soins de santé et l'éducation.
« L'éducation demeure l'un des secteurs les moins couverts par l'AGCS en raison des préoccupations légitimes relatives au fait que la libéralisation des échanges risquerait de restreindre la capacité des gouvernements à fournir et à réguler de façon efficace une éducation de qualité », indique la note de l’IE. « Néanmoins, à l’instar de plusieurs pays, des groupes de pression du secteur privé ont appelé à des engagements plus importants et plus nombreux. »
L'ACS entend se baser sur l'AGCS qui contient une exception générale pour les « services fournis dans l'exercice du pouvoir gouvernemental ». Cette exception est cependant très limitée et donne lieu à des interprétations conflictuelles, car ces services sont définis comme ceux fournis sur une base non commerciale et ne faisant pas concurrence à d'autres prestataires. En d'autres termes, si une quelconque partie du système éducatif d'un pays est fournie sur une base commerciale ou gratuitement, ou s'il existe des écoles privées, l'éducation n'est alors pas incluse dans cette exclusion générale. Etant donné que la majorité des systèmes éducatifs intègrent à la fois des services à but non lucratif et commerciaux, publics et privés, il est peu probable que, dans de nombreux pays, le secteur de l'éducation puisse bénéficier de cette exclusion générale, fait observer l’IE.
La note souligne que « l'inclusion de services d'éducation dans un accord commercial soulève d'importantes préoccupations. Les règles commerciales sont juridiquement contraignantes et peuvent avoir pour conséquence un blocage et une intensification des pressions en faveur de la commercialisation et de la privatisation. Par exemple, les règles relatives à l'accès aux marchés peuvent venir restreindre la capacité des pays prenant des engagements au niveau des services d'éducation à limiter l'entrée sur le marché et à réglementer les activités des écoles et institutions privées et à but lucratif. L'ACS entend garantir une ‘neutralité concurrentielle’ ou des règles uniformes pour les prestataires publics et privés, impliquant que les gouvernements ne pourraient dès lors pas favoriser les écoles publiques. »
La commercialisation de l’éducation met en danger sa qualité
La lettre note aussi que les accords commerciaux peuvent également nuire à la capacité des autorités à garantir la qualité des services d'éducation proposés. A l'instar de l'AGCS, l'ACS vise à promouvoir le libre-échange des services en garantissant des marchés ouverts à tous. Toutefois, en offrant un accès libre au marché à toutes les entreprises d'éducation étrangères, les gouvernements pourraient ouvrir la porte à bon nombre de prestataires de qualité douteuse, déclare l’IE.
« L'IE surveille activement les négociations sur l'ACS, ainsi que les débats connexes, afin de faire pression pour que l'éducation et d'autres services publics soient totalement exclus de cet accord », a indiqué le secrétaire général de l’IE Fred van Leeuwen. « Nous travaillons en étroite collaboration avec l'Internationale des Services Publics afin d’effectuer davantage de recherches et d'analyses sur les raisons pour lesquelles l'ACS nuit aux services publics. »
Il a également souligné que les autorités publiques portent la responsabilité de garantir un enseignement public gratuit de qualité pour toutes et tous.
L’IE appelle ses affiliés dans les pays impliqués dans les négociations de l'ACS à contacter les responsables gouvernementaux concernés et à leur expliquez-leur pourquoi l'éducation et les autres services publics doivent être exclus de cet accord. Aux affiliés des pays membres de l'OMC, mais ne participant pas aux négociations sur l'accord ACS, l’IE recommande de rencontrer leurs dirigeants afin de s'assurer qu'ils ne rejoindront pas les négociations.
La circulaire peut être lue dans son intégralité ici.