Ei-iE

Les enseignant(e)s reprochent à Pearson de financer l'entreprise à but lucratif Bridge International Academies

Publié 8 mai 2018 Mis à jour 19 juin 2018

Les militant(e)s du secteur de l'éducation, les enseignant(e)s et les dirigeant(e)s syndicaux/ales se sont rendu(e)s à Londres à l'occasion de l’assemblée générale annuelle de la multinationale Pearson, afin d’exhorter ses actionnaires à cesser tout financement de Bridge International Academies, une entreprise à but lucratif qui génère des bénéfices aux dépens de l’éducation de milliers d’enfants démuni(e)s.

Des représentant(e)s de l’Internationale de l'Education (IE), du National Education Union(NEU), de l’ American Federation of Teachers(AFT), de l' University and College Union(UCU), d'UNISON et de Global Justice Now ont pris ouvertement part à la manifestation et se sont montré(e)s solidaires en faveur d’un enseignement public et de qualité gratuit pour tou(te)s.

L’Honorable Amos Muhinga Kimunya, président adjoint du Comité de l'éducation au Parlement du Kenya, a également participé à la manifestation en tant qu’observateur.

Lors de l'annonce de la fermeture des écoles de Bridge, les autorités kenyanes et ougandaises ont évoqué les différents manquements de la multinationale, qui n’a ni cherché à obtenir une autorisation de fonctionnement ni réussi à employer des enseignant(e)s qualifié(e)s. En outre, la société n’aurait pas respecté les exigences du programme national et aurait utilisé des établissements dangereux. De son côté, Bridge a répliqué en attaquant ses détracteurs/trices en justice afin de les réduire au silence.

Pendant l'assemblée générale, Angelo Gravielatos de l’IE et Kevin Courtney, co-Secrétaire général du NEU, ont demandé des explications à John Fallon, PDG de Pearson, qui a affirmé que Pearson n’avait aucune intention de cesser de soutenir Bridge.

« Tout enfant a le droit à une éducation gratuite et de qualité, avec des enseignants qualifiés et dans un environnement d’apprentissage sûr. Bridge se sert de ces droits pour générer des bénéfices tout en fournissant une éducation de qualité inférieure, qui exacerbe les inégalités dans les communautés auxquelles elle 'rend service'. En outre, personne ne peut justifier l’investissement de Pearson dans ce modèle économique fondé sur l’exploitation », a ajouté Kevin Courtney.

Pearson perd toute crédibilité

En réponse aux inquiétudes de l’IE, John Fallon, PDG de Pearson, a affirmé avoir enquêté sur le sujet et été satisfait de la réponse de Bridge.

« C’est incroyable. Pearson a tout simplement ignoré les décisions du Ministre et des autres autorités en charge de l’éducation de deux nations souveraines en plaçant Bridge au-dessus de la loi. C’est l'apogée du néo-colonialisme », s’est insurgé Gavrielatos. « M. Fallon ne semble accorder aucune importance au fait que Bridge enfreint la loi au Kenya et en Ouganda », a-t-il protesté.

Des éducateurs/trices du monde entier, notamment d’Allemagne, de Suède et des Etats-Unis ont exprimé leur solidarité envers les manifestant(e)s et envoyé des messages au PDG de Pearson. « Bridge International Academies est une entité incapable d'œuvrer pour la réalisation des objectifs en matière d’éducation qui ont été déterminés d'un commun accord », a expliqué Johanna Jaara Åstrand, présidente du syndicat d'enseignants suédois Lärarförbundet.

En Allemagne, les éducateurs/trices ont manifesté leur vive opposition aux programmes proposés par Bridge, qui sont non seulement payants mais aussi médiocres. « Nous promouvons un enseignement public de qualité assuré par des enseignants qualifiés et des outils numériques qui libèrent les jeunes esprits », a affirmé Nick Strauss au nom du Gewerkschaft Erziehung und Wissenschaf t (GEW).

Bridge est la plus grande entreprise à but lucratif active dans le domaine de l’éducation. Dans son plan de développement figure notamment la commercialisation de services d'éducation de base à dix millions d’étudiant(e)s en échange de frais d’inscription en Afrique et en Asie d’ici 2025. Ce plan s’appuie sur le recrutement de personnel non qualifié, qui dispense un programme scolaire standardisé et basé sur un script dans des installations ne répondant pas aux normes.

Malgré les campagnes de promotion rondement menées, il est évident que la multinationale recourt à des techniques de réduction des coûts afin de réduire les coûts de fonctionnement et de maximiser ainsi les profits. Bridge a été condamnée à fermer ses écoles en Ouganda et au Kenya en raison de son ignorance et son indifférence à l’égard des lois et programmes nationaux des deux pays.