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Elsevier: le savoir à quel prix?

Publié 13 novembre 2018 Mis à jour 19 décembre 2018

Dans sa dernière publication, l’Internationale de l’Education s’intéresse au géant de l’édition Elsevier, qui ne doit sa réussite commerciale qu’à des pratiques douteuses sur le plan éthique mettant en péril la transmission des connaissances et le bien public que cela représente.

Le rapport intitulé « Démocratiser le savoir: rapport sur l'éditeur scientifique Elsevier » a été préparé pour l’Internationale de l’Education (IE) par l’enseignant et chercheur Jonathan Tennant. Ce dernier analyse les pratiques du géant de l’édition Elsevier, leader sur la marché de la publication d’articles et de revues universitaires, ainsi que les conséquences de sa position dominante sur la communauté universitaire et la recherche. L’étude a été présentée à l’occasion de la conférence de l’IE sur l’enseignement post-secondaire, supérieur et la recherche, convoquée à Taipei, à Taïwan.

Quasi-monopole

Le groupe Elsevier est actuellement leader sur le marché des publications universitaires, tant en envergure qu’en influence. Ce dernier doit sa réussite à des pratiques visant à établir un monopole, à exclure toute concurrence et à transformer un bien produit au sein des universités publiques en un bien privé payant uniquement destiné à ses souscripteurs. Compte tenu du prestige croissant dont jouissent les publications universitaires, nombre de chercheurs/euses sont amené(e)s à céder leurs publications et leurs droits d’auteur à Elsevier pour que leurs travaux soient connus du public.

Parmi les pratiques commerciales d’Elsevier discutables sur le plan éthique et mises en évidence par la recherche de l’IE, citons:

-          Le recours aux accords de confidentialité pour empêcher les clients d’Elsevier de connaître le prix que paient les autres pour ses services, écartant ainsi toute forme de concurrence.

-          Les pressions exercées contre les politiques progressistes prônant le libre accès à la connaissance.

-          Un gain annuel net d’environ 37 % grâce aux fonds publics, représentant entre 68 et 75 % de ses revenus.

-          La collecte de données et d’analyses pour les autres maisons d’édition, générant ainsi un important conflit d’intérêt.

Démocratiser le savoir

L’étude se penche également sur une préoccupation majeure de l’IE et de ses organisations membres: la démocratisation du savoir et les obstacles que suppose ce type de publication payante pour les établissements scolaires et les individus dont les moyens financiers sont limités. Le rapport présente également plusieurs exemples de résistance de la part des universités et des bibliothèques dans différents pays du monde, ainsi que des recommandations d’action pour les syndicats de l’éducation.

David Edwards, Secrétaire général de l’IE, a souligné les tensions entre les intérêts privés et publics dont le rapport fait état: « L’enseignement supérieur et la recherche sont des droits sociaux fondamentaux et ne devraient, à ce titre, jamais être commercialisés par des tiers dont l’unique finalité est le profit et non la promotion de l’accès à la connaissance. Nous devons démocratiser le savoir si nous souhaitons instaurer la justice sociale au travers de l’éducation de qualité pour toutes et tous. L’IE et ses plus de 32 millions d’affiliés se battent chaque jour pour cela. »