La communauté internationale se penche sur la situation du personnel enseignant contractuel
Le dialogue social constitue un outil essentiel pour l’amélioration des conditions d’emploi du personnel contractuel et de l’ensemble des employé(e)s de l’éducation, a souligné un représentant de l’Internationale de l’Education lors d’une conférence sur le recours au personnel enseignant contractuel.
Cette réunion était organisée du 20 au 22 juin à Addis-Abeba, en Ethiopie, par le Groupe de travail international des enseignant(e)s en faveur de l’Education pour Tous (TTF), mis en place par l’UNESCO.
Le TTF a examiné le recours au personnel enseignant contractuel dans 25 pays d’Afrique sub-saharienne et a présenté ses conclusions aux consultant(e)s nationaux/ales et représentant(e)s des ministères de l’Education de chaque pays participant à la conférence.
Recruter davantage de personnel enseignant qualifié
Edem Adubra, Directeur de l’équipe TTF, a expliqué aux participant(e)s que « garantir une éducation de qualité équitable et inclusive, ainsi que promouvoir des opportunités d’apprentissage pour tous tout au long de la vie (à l’horizon 2030), sont les cibles à atteindre pour l’éducation dans le cadre des Objectifs de développement durable (ODD) ». Elaborer des politiques pertinentes pour les enseignants est essentiel si l’on souhaite garantir la mise en œuvre efficace et durable des objectifs, tout en assurant la gestion rentable du réservoir d’enseignants, a-t-il ajouté. De même, le sous-objectif de l’ODD Education consacré aux enseignant(e)s, identifié(e)s comme étant « les moyens de mise en œuvre de cet objectif », revendique une augmentation du nombre d’enseignant(e)s qualifié(e)s, ainsi qu’un renforcement de leur formation. Afin de pouvoir déterminer le besoin à long terme en enseignant(e)s formé(e)s, ainsi que la nature, la portée et le niveau des formations offertes, il est important de tenir compte de la situation actuelle, a-t-il précisé.
La conférence a également mis en lumière que la communauté éducative mondiale n’a cessé de souligner que chaque élève a le droit de bénéficier d’un enseignement dispensé par du personnel enseignant qualifié, motivé, bien encadré et détenteur d’une formation professionnelle.
Le recrutement d’enseignant(e)s contractuel(le)s est une pratique appliquée dans le monde entier pour diverses raisons. Cette situation a de multiples implications dans des domaines tels que l’enseignement et l’apprentissage, la gestion du personnel enseignant, les résultats d’apprentissage et l’image de la profession aux yeux de la société. Plusieurs pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à haut revenu ont eu recours aux enseignant(e)s contractuel(le)s pour diverses raisons, a souligné Adubra, rappelant que ce phénomène se développe de manière significative, et en particulier en Afrique sub-saharienne.
Importance du dialogue social
Tel que le définit l’Organisation internationale du Travail, « le dialogue social inclut tous types de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs, sur des questions présentant un intérêt commun », a souligné Dennis Sinyolo (IE) dans sa présentation « Promouvoir le dialogue social pour les enseignant(e)s et l’enseignement ».
Engagement des parties prenantes
Si l’on souhaite garantir l’efficacité des mesures mises en place pour l’éducation et les enseignant(e)s, il est crucial que les différents acteurs de l’éducation puissent participer et faire entendre leur voix lors de l’élaboration des politiques, a déclaré Sinyolo. Ce dernier a également cité divers exemples de mécanismes de dialogue social, comme les Groupes locaux pour l’éducation - partie intégrante du mécanisme de dialogue politique du Partenariat mondial pour l’éducation - et le Sommet international sur la profession enseignante, un événement annuel qui réunit les ministres de l’Education et les responsables syndicaux des Etats membres et partenaires de l’OCDE pour discuter des moyens d’améliorer le statut de la profession enseignante, ainsi que la qualité des effectifs, de l’enseignement et de l’apprentissage.
Thématiques de dialogue
Il a recommandé que les gouvernements, les organisations d’enseignants et d’autres parties prenantes engagent un véritable dialogue concernant le statut professionnel et les conditions de travail des enseignant(e)s contractuel(le)s et de l’ensemble du personnel enseignant, avant de préciser, en guise de conclusion, que ce dialogue devrait mettre l’accent sur les points suivants:
· Formation et développement professionnel des enseignant(e)s
· Evaluation des enseignant(e)s et systèmes de suivi
· Structures d’encadrement des enseignant(e)s, direction et gouvernance
· Salaires et conditions de travail
· Outils et ressources pédagogiques
· Privatisation et commercialisation de l’éducation
Renforcement des compétences et mise à niveau
Les gouvernements/institutions de formation des enseignant(e)s devraient proposer des programmes de renforcement et de mise à niveau des compétences (formation initiale et continue) destinés au personnel enseignant contractuel peu ou pas qualifié, a précisé Sinyolo. Ces programmes permettaient d’obtenir non seulement les certifications et les qualifications requises, mais également la reconnaissance. Ils contribueraient également au développement, au financement et à la mise en œuvre de politiques globales pour les enseignant(e)s, afin de garantir que l’enseignement de chaque élève soit confié à des enseignant(e)s qualifié(e)s, motivé(e)s et bien encadré(e)s.
Droits humains
Kishore Singh, Rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’éducation, a souligné la nécessité pour les gouvernements de protéger l’éducation en tant que droit humain et bien public. Il a affirmé que les prestataires de services éducatifs privés portaient atteinte au droit à l’éducation de qualité des enfants pauvres et a épinglé les graves problèmes entourant les écoles privées, lesquelles bafouent les droits des enseignant(e)s.
Singh a également rappelé que les normes et principes qui sous-tendent le droit à l’éducation sont mis à mal par les forces du marché, notamment dans le domaine des technologies numériques. « Il est d’une importance cruciale de protéger l’éducation contre la privatisation », a-t-il déclaré. Les autorités publiques « doivent reconnaître que les rapports humains au sein de l’éducation sont essentiels à l’enseignement et aux processus d’apprentissage » et les technologies numériques doivent être « considérées comme un instrument pédagogique et non comme un substitut à l’enseignement dispensé par un être humain », a-t-il ajouté.
Son dernier rapport est disponible ici.
Evénements parallèles
La conférence sur les enseignant(e)s contractuel(le)s a été suivie de deux événements parallèles: la réunion des doyens africains du Forum sur l’éducation et une réunion de la Commission de l’Union africaine consacrée à la mise en œuvre de la stratégie continentale en matière d’éducation pour l’Afrique (CESA) 2016-2025, les 23 et 24 juin. La CESA accordera la priorité à 12 objectifs, dont la revitalisation de la profession enseignante, une initiative qu’elle espère pouvoir mener en étroite collaboration avec l’IE et d’autres parties concernées.