Document politique de l'IE sur les droits humains et syndicaux
Le 7e Congrès mondial de l’Internationale de l’Éducation (IE), réuni à Ottawa du 21 au 26 juillet 2015, adopte le projet de Document politique sur les droits humains et syndicaux.
Le Document politique sur les droits humains et syndicaux décrit comment les droits humains et syndicaux renforcent le travail des syndicats de l’éducation et mandate ceux-ci pour agir au nom de leurs membres. Ce document politique reflète les valeurs et objectifs défendus par l'IE par le biais de sa constitution, ses politiques et ses activités de programme. Il est complémentaire du Document politique sur l’éducation adopté par le 6e Congrès mondial de l’IE en 2011.
Préambule
* L'Internationale de l'Éducation (IE) est la voix du secteur de l'éducation dans le monde; elle représente les enseignant(e)s et les personnels de soutien à l’éducation à tous les niveaux - de l'éducation de la petite enfance à l'enseignement supérieur et la formation professionnelle. En tant que plus grande et plus représentative Fédération syndicale internationale avec plus de 30 millions de membres dans 171 pays, l’IE unit tou(te)s les enseignant(e)s et autres employé(e)s de l'éducation; elle protège leurs intérêts et défend leurs droits humains et syndicaux.
* L'IE est guidée par les principes des droits humains et syndicaux, et par son engagement en faveur de la démocratie, de l’équité et de la justice sociale. Elle est indépendante des gouvernements et des organisations intergouvernementales. Elle est autonome et libre de toute influence ou contrôle de la part de tout parti politique ou groupement idéologique ou religieux, ou de tout intérêt commercial. L'IE promeut et défend les droits de tou(te)s les enseignant(e)s et autres personnels de l'éducation, et fait campagne pour une éducation de qualité pour tou(te)s, qui soit financée et administrée publiquement.
* L'IE défend fermement les droits syndicaux dans le monde entier et participe au développement d’organisations fortes, indépendantes, démocratiques, durables, inclusives et représentatives des enseignant(e)s, du personnel enseignant, des professeur(e)s et chercheurs/euses, des chefs d’établissement, des personnels en cours de titularisation, des personnels de soutien, assistant(e)s et de tout autre personnel du secteur de l'éducation. L'IE encourage la solidarité et la coopération au sein et entre ses organisations membres.
* Après avoir adopté le Document politique sur l'éducation en 2011, qui présente une synthèse exhaustive des politiques de l’IE en matière d’éducation, l'IE a décidé d'élaborer un document politique complémentaire sur les droits, décrivant le cadre des droits humains et syndicaux qui guide le travail de l’organisation et oriente les politiques et programmes qu’elle met en œuvre pour promouvoir les droits individuels et collectifs.
* Ce document reflète les valeurs des organisations membres de l'IE et les demandes du mouvement syndical de l'éducation, y compris le droit universel à une éducation gratuite de qualité, le respect des droits des enfants et des droits humains et syndicaux de tou(te)s les enseignant(e)s et travailleurs/euses de l'éducation, ainsi que les droits collectifs des organisations qui les représentent.
* Le Document politique sur les droits repose sur la notion d’état de droit et les principes et pratiques des droits humains et syndicaux, en particulier ceux consacrés par les traités internationaux et régionaux, dont la Déclaration universelle des droits de l’Homme et les conventions et recommandations de l’Organisation internationale du Travail (OIT).
* Ce document offre un cadre approprié pour le développement de politiques et programmes mettant en place les conditions nécessaires pour promouvoir la justice sociale, lutter contre la pauvreté et s’opposer à toute forme de discrimination, qu’elle soit fondée sur l’âge, le genre, l’identité de genre et l’orientation sexuelle, l’indigénéité ou l'origine ethnique, le handicap, la langue, le statut marital, le statut migratoire, le militantisme syndical, l’engagement politique, la race, la religion, le statut socio-économique, parmi d'autres.
* La liste des droits présentés dans ce document, qu’ils soient définis comme droits humains ou syndicaux, ou comme dérivant de ces droits – tels que les droits économiques, sociaux, environnementaux ou culturels, n'est pas exhaustive.
Les droits humains dans un monde globalisé
1. Les droits humains sont universels et inaliénables, interdépendants et indivisibles; ils impliquent à la fois des droits et des obligations. L'IE estime que tous les peuples de toutes les nations devraient vivre en paix, à l’abri des guerres et conflits et de toute forme de violence et d'exploitation, et bénéficier d’une culture de respect de leurs droits humains, de la démocratie, de la justice sociale et de l'égalité. Les normes et principes des droits humains, ainsi que les engagements en leur faveur, doivent être constamment maintenus et promus par l'action collective et individuelle.
2. Certains effets de la mondialisation ont eu une incidence négative sur la réalisation et la protection des droits humains. Alors que divers traités et politiques, aux niveaux national, régional et international, ont guidé des aspects de la mondialisation, comme la libéralisation des marchés et la privatisation, les entreprises profitent de statut d’extraterritorialité, permettant aux investisseurs étrangers d’ignorer les principes de droits humains et syndicaux. À l'inverse, les États renoncent à ou sont privés de leur pouvoir de réglementer les marchés et l'économie.
3. Le droit de former des syndicats et d'y adhérer (liberté syndicale) et le droit de négocier collectivement sont des droits humains fondamentaux reconnus dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme, la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail, et divers traités régionaux. Le droit de grève est indissociable du droit à la liberté syndicale.
4. Les syndicats, y compris les syndicats de l’éducation, ont un rôle important à jouer dans la promotion et la défense des droits humains de tou(te)s. Ils doivent collaborer à tous les niveaux afin de protéger ces droits et de garantir que chacun(e) bénéficie de leur application, y compris le droit à un enseignement public gratuit de qualité et les droits connexes dans le secteur de l'éducation.
5. Une approche fondée sur les droits sous-tend le travail de l'IE et de ses membres. Dans cette approche, les personnes ne sont pas seulement considérées comme bénéficiaires passives des droits humains, mais bien comme des détentrices actives et déterminées de leurs droits. Toute violation des droits peut conduire à une indemnisation ou une réparation légitime. Les détenteurs/trices des droits peuvent demander des comptes aux responsables chargé(e)s de respecter et maintenir ces droits. Par le biais des gouvernements, les États sont le garant des droits. Une approche fondée sur les droits vise à faire en sorte que chacun(e) soit conscient(e) de ses droits. L'éducation est cruciale pour assurer une connaissance et une sensibilisation généralisées aux droits humains et aux autres droits.
L’éducation pour le monde que nous voulons
6. Le droit à l'éducation est crucial dans la concrétisation de l'ensemble des droits humains et dans la réalisation de la justice sociale dans le monde entier. Une éducation de qualité fournit aux personnes les connaissances et aptitudes nécessaires pour questionner, conceptualiser et résoudre les problèmes tant au niveau local que mondial, et contribuer activement au développement durable et démocratique des sociétés. Une éducation de qualité inclusive et équitable est également fondamentale pour la réalisation de tous les autres domaines du développement humain, y compris la santé, la nutrition et la durabilité de l’environnement. Une éducation de qualité forme à l'esprit critique, permet la compréhension et la connaissance des droits et développe la capacité à les appliquer et les défendre.
7. L'enseignement de l'égalité et le respect de la diversité et des différences doivent être intégrés dans les programmes scolaires afin de contrer les stéréotypes et la discrimination implicite ou explicite. Les travailleurs/euses de l'éducation doivent recevoir une formation initiale de haute qualité et doivent avoir accès à une formation professionnelle continue afin d'exercer leur métier conformément aux principes d'égalité, y compris en prévenant la violence, particulièrement contre les femmes et les filles.
8. Les établissements scolaires sont à la fois un lieu d'acquisition d'une culture de paix et d'une pratique de cette culture. Les institutions éducatives ont la responsabilité de promouvoir le développement de toute la personne, de permettre à chacun(e) de devenir un(e) citoyen(ne) du monde actif/ive et avec une conscience sociale, apte à contribuer à la société d’une manière consciente, bienveillante, responsable et écologique. L'éducation à la citoyenneté et aux droits humains s’intègre dans une approche de l'éducation fondée sur les droits et devrait être incorporée dans toutes les matières et tous les environnements d'apprentissage. Elle repose sur une compréhension des objectifs éducatifs allant au-delà de la simple acquisition des savoirs, aptitudes et compétences et vise à transformer la manière dont les gens pensent et agissent individuellement et collectivement et vivent ensemble.
9. L’éducation est une condition essentielle de la réalisation des individus, de la paix, du développement durable, de la croissance économique, du travail décent, l’égalité et de la citoyenneté mondiale. Elle contribue à renforcer la démocratie et la cohésion sociale et à encourager le respect du vivre ensemble et de la diversité culturelle et linguistique. L'éducation est décisive pour unir les nations et rapprocher les êtres par les valeurs et aptitudes de compréhension, solidarité et coopération. La persistance des conflits armés, de l’extrémisme, du militarisme, du sectarisme et du terrorisme exige des efforts continus dans la société civile organisée, dans laquelle les organisations syndicales ont une présence considérable, pour promouvoir une culture de paix, de respect, de tolérance et de non-violence qui est essentielle aux droits humains.
10. Les établissements scolaires doivent être reconnus, partout dans le monde et par toutes les parties aux conflits, comme des havres de paix où chacun bénéficie de chances égales de développer son potentiel dans un environnement sûr et protégés de toute forme de violence. Chaque enfant et adulte a droit à un environnement d'apprentissage et d’enseignement pacifique et sécurisé. Toute législation nationale devrait protéger les élèves, enseignant(e)s, universitaires et l’ensemble des personnels des attaques politiques ou militaires violentes à l’encontre des lieux d’apprentissage, y compris sur le chemin vers ou depuis leur lieu d’étude ou de travail.
Le rôle des syndicats de l’éducation
11. Le mouvement syndical contribue à la promotion de la justice sociale dans le monde entier, et l’action syndicale collective a entraîné dans le passé et entraînera encore à l’avenir des améliorations dans la vie et les conditions de travail des travailleurs/euses et de leur famille. La justice sociale passe notamment par la possibilité pour toutes les femmes et tous les hommes d’obtenir un emploi productif et décent, dans des conditions d’équité, de sécurité et de dignité.
12. Les syndicats de l’éducation œuvrent pour faire progresser les droits des personnels, tout en contribuant à garantir le droit de tous les enfants à une éducation de qualité.
13. Les syndicats de l'éducation luttent, partout dans le monde, pour de meilleures opportunités d’emploi, pour des conditions de travail, des salaires et des retraites décents, pour une protection sociale et des pour les droits sociaux fondamentaux, ainsi que pour une répartition plus équitable des richesses. La privatisation et la commercialisation des services publics, y compris dans l'éducation, peut, entre autres effets négatifs, entraîner une érosion de la prise de décision démocratique et de la responsabilité publique dans la gouvernance de l'éducation. Par ailleurs, les tactiques antisyndicales et les modifications unilatérales non négociées des relations du travail entraînent une précarisation des conditions de travail et l'affaiblissement des droits syndicaux des enseignant(e)s et autres personnels de l'éducation. Beaucoup de personnels de l'éducation sont privés de justice sociale en raison de contrats à durée déterminée précaires, de salaires bas et irrégulièrement payés, et de protection sociale et allocations insuffisantes ou inexistantes.
14. Les droits à la liberté syndicale et à la négociation collective sont inscrits dans les Conventions 87 et 98 de l'OIT. Les travailleurs/euses ont le droit de former et de s’affilier aux organisations de leur choix. La mobilisation au sein des syndicats permet aux travailleurs/euses d’être solidaires pour promouvoir et défendre leurs droits. Cette solidarité est le moyen le plus efficace et légitime de faire progresser les intérêts communs et de parvenir à des conditions équitables d'emploi.
15. Les syndicats de l’éducation représentent les personnels dans le dialogue social avec les autorités éducatives (publiques ou privées). Les syndicats de l'éducation poursuivent plusieurs objectifs à travers un dialogue social constructif: la réalisation du droit humain à l'éducation en exigeant un enseignement public gratuit de qualité pour tou(te)s; la participation des enseignant(e)s et des personnels de soutien dans les processus de réforme de l’éducation; la promotion et la défense des droits démocratiques fondamentaux, des intérêts professionnels et des conditions de travail décentes des personnels; et le respect des droits syndicaux fondamentaux à la liberté syndicale et de négociation collective par l’application pleine et entières des normes fondamentales du travail de l’OIT. Les conventions collectives doivent être respectées par les employeurs.
16. Les syndicats de l’éducation ont le droit d'élaborer leurs statuts et règlements, d'élire leurs représentant(e)s, d'organiser leur administration et leurs activités et de formuler leurs programmes sans ingérence extérieure. Les syndicats de l’éducation ont le droit de s’affilier à des fédérations et des confédérations et d’adhérer à des organisations syndicales internationales. Les organisations syndicales doivent fonctionner de manière démocratique et l'adhésion et l'accès aux postes de responsabilité doivent être exempts de toute discrimination.
17. Un effort durable est nécessaire pour promouvoir la solidarité et la coopération entre syndicats de l'éducation aux niveaux national, régional et international. La fragmentation du mouvement syndical, que ce soit en raison de conflits internes ou d’ingérences extérieures, affaiblit l'expression efficace des intérêts collectifs. Elle donne également l’opportunité aux employeurs, aux gouvernements et aux autres autorités d’exploiter les divergences entre syndicats pour ne pas répondre aux besoins des enseignant(e)s et autres personnels de l’éducation, et pour mettre en place, sans aucune opposition concertée, des politiques hostiles aux intérêts des travailleurs/euses de l’éducation et contraires au financement et à l’offre d’éducation de qualité.
18. Les syndicats de l’éducation s'engagent dans un dialogue constructif avec les syndicats d'autres secteurs, avec les représentant(e)s de la société civile, y compris les organisations non gouvernementales (ONG) aux niveaux national et international. Les syndicats de l’éducation s’engagent également dans la coopération internationale pour le développement syndical. La participation accrue dans le secteur de l'éducation des organisations de parents et d'élèves instaure les conditions de partenariats nécessaires à la poursuite d’intérêts communs.
Droits des personnels du secteur de l’éducation
19. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont le droit de former et de s’affilier à des syndicats. De nombreux enseignant(e)s et personnels de l'éducation vivent et travaillent dans des conditions périlleuses, inadéquates et précaires, qui les empêchent de militer dans les syndicats. En dépit des conventions internationales du travail, les personnels et les chefs d’établissement dans certains pays se voient refuser le droit d'adhérer à des syndicats et/ou font face au harcèlement, à des conditions de travail injustes, à des licenciements, jusqu’à des détentions arbitraires et même la mort en raison de leur activité syndicale. Certains gouvernements maintiennent ou développent des obstacles politiques, structurels et juridiques à la syndicalisation. Le droit de créer et de s’affilier à l’organisation de leur choix sans autorisation préalable est un droit fondamental pour chaque personnel de l’éducation. Ils/Elles devraient bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination antisyndicale. Un climat exempt de violence, de pressions, de menaces ou de toute ingérence extérieure est indispensable au plein exercice de la liberté syndicale.
20. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont le droit de négocier collectivement leurs conditions d'emploi par le biais de mécanismes de négociation collective institutionnalisés et réglementés où les intérêts des personnels sont représentés par leur syndicat. Les salaires individualisés fixés unilatéralement par l'employeur sans concertation devraient être interdits. Les représentants des personnels devraient être inclus dans toute prise de décisions touchant l'organisation et le contenu de l'éducation et les intérêts du secteur.
21. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation devraient être informé(e)s de leurs droits et bénéficier d’une représentation syndicale ou professionnelle à chaque étape de toute procédure disciplinaire, plainte ou évaluation professionnelle.
22. Garantir le droit d'enseigner nécessite un environnement démocratique, un accès libre au savoir, ainsi qu’une formation adéquate des personnels de l’éducation, des conditions de vie et de travail décentes et la reconnaissance et la défense du statut de la profession.
23. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont droit à la liberté d'expression. L'IE souscrit à la recommandation OIT/UNESCO de 1966 qui stipule dans ses articles 79 et 80: « Il conviendrait d'encourager la participation des enseignants à la vie sociale et publique dans l'intérêt des enseignants eux-mêmes, de l'enseignement et de la société tout entière. Les enseignants devraient être libres d'exercer tous les droits civiques dont jouit l'ensemble des citoyens et devraient être éligibles à des charges publiques. »
24. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont droit à l'égalité de traitement et à être exempts de toute forme de discrimination. Chacun(e) doit recevoir une formation initiale et continue de même niveau, bénéficier de conditions de travail équitables et recevoir un salaire égal pour un travail de même valeur, indépendamment de l’âge, du genre, identité de genre et orientation sexuelle, l’indigénéité ou l'origine ethnique, le handicap, la langue, le statut marital, le statut migratoire, le militantisme syndical, l’engagement politique, la race, la religion, le statut socio-économique, parmi d'autres.
25. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont droit à un emploi stable et sûr. Le recours de plus en plus courant aux contrats précaires à durée déterminée, à temps partiel ou occasionnels, sans sécurité social et/ou titularisation, est une tendance négative qui doit cesser. Cette précarisation affecte de manière disproportionnée les femmes, les minorités et les jeunes. L'IE condamne aussi le recours croissant à des personnes non qualifiées et/ou non formées sous contrats précaires, privées de protection sociale, sans perspective de carrière et moins bien rémunérées que les personnels qualifiés.
26. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont droit à une protection sociale, quel que soit le type d'établissement qui les emploie. Cette protection devrait inclure les soins médicaux, les indemnités de maladie, le chômage, les allocations de retraite, les allocations d’accident du travail, l’assurance maladie, les allocations familiales, les allocations parentales, les allocations d'invalidité et de survie. La protection sociale devrait être étendue aux périodes de probation et de la formation et à ceux/celles qui entrent dans la profession sur une base temporaire.
27. Les travailleurs/euses de l'éducation à tous les niveaux de l'éducation doivent être correctement formé(e)s et qualifié(e)s. Chacun(e) a le droit de poursuivre une formation professionnelle et un perfectionnement continus. Des systèmes de soutien adéquats, tels que les programmes de mentorat doivent être mis à disposition des nouveaux/elles et futur(e)s enseignant(e)s. Les travailleurs/euses de l'éducation ont droit à des opportunités de promotion et d'avancement de carrière et devraient bénéficier d’opportunités de développement professionnel.
28. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont le droit d'entreprendre des actions revendicatives, y compris des actions de grève. L’action industrielle permet aux travailleurs/euses d’instaurer un rapport de force dans la négociation des relations professionnelles. Le droit de grève est reconnu dans les instruments normatifs internationaux et régionaux et par des décisions judiciaires.
29. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont droit à un environnement de travail sain et sûr. Cela inclut, mais n'est pas limité à, un nombre raisonnable d'élèves par classe et l’accès à des procédures de sécurité et de santé pour traiter les questions liées au stress et à la violence au travail et au harcèlement professionnel, notamment le harcèlement sexuel.
30. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont droit à l'autonomie professionnelle et à la liberté académique. Les personnels devraient être impliqués dans le choix et l'adaptation du matériel pédagogique, la sélection des manuels scolaires et le développement et l’application des méthodes pédagogiques.
31. La liberté académique dans l'enseignement et la recherche est étroitement liée à la titularisation académique ou son équivalent. Des politiques et ressources sont nécessaires pour garantir la liberté académique, l’autonomie professionnelle et les droits de propriété intellectuelle.
32. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation ont droit à une direction professionnelle, juste, participative et équitable. Les personnels devraient également avoir le droit d'exprimer leurs préoccupations et plaintes auprès des directions d’établissements sans crainte de conséquences négatives pour leur emploi, statut ou conditions de travail.
Droits des enfants et des élèves
33. Chacun(e) a droit à une éducation publique, gratuite, équitable, inclusive et de qualité de douze années minimum, dont au moins neuf années sont obligatoires. Les gouvernements ont la responsabilité, découlant de la Convention des droits de l’enfant, de fournir les mêmes droits à l’éducation à tous les enfants, sur base du principe d’égalité des chances. Une attention particulière doit être accordée aux enfants vulnérables et notamment les enfants migrants, déplacés internes, orphelins, demandeurs d’asile ou refugiés.
34. Les politiques de privatisation conduisent parfois à miner le droit à une éducation gratuite, équitable et de qualité; créant, exacerbant et enracinant les inégalités dans l'accès et la participation à l’éducation; modifiant les conditions et relations de travail des personnels; sapant leurs droits et érodant la prise de décision démocratique et la responsabilité de la gouvernance de l’éducation.
35. Les conditions physiques d'apprentissage ont un impact direct sur la qualité de l'éducation et sur le bien-être et la santé des élèves et du personnel. L'espace et l'équipement doivent correspondre aux exigences des politiques éducatives et des programmes, y compris en matière de disponibilité du matériel pédagogique. Tous les établissements doivent avoir accès à l'eau potable et disposer d'installations sanitaires adaptées, y compris des toilettes séparées pour filles et garçons, un éclairage, une ventilation et un système de chauffage adéquats, ainsi qu’un système d’évacuation des eaux usées. Les bâtiments et installations doivent également procurer un sentiment de sécurité et de protection aux élèves et au personnel contre tout dommage physique.
36. Les châtiments corporels constituent un traitement cruel et dégradant non conformes aux normes internationales de droits humains et sont contraires au principe d’environnements éducatifs sûrs. Les punitions physiques ne peuvent être permises en tant que méthodes d’apprentissage ou de discipline dans aucune instance éducative.
37. Tous les enfants et élèves ont droit à un processus d'apprentissage inclusif, exempt de discriminations, notamment celles fondées sur le genre, d’abus sexuels et psychologiques, de harcèlement et intimidation, y compris la cyber-intimidation, et d’autres formes de violence. Tou(te)s les travailleurs/euses de l'éducation devraient être formé(e)s à la résolution pacifique de conflits pour garantir et promouvoir les intérêts et le bien-être des élèves. Les directions devraient adopter, en concertation, des stratégies de prévention et lutte contre la violence et l’intimidation.
38. Tous les enfants devraient bénéficier d'un apprentissage actif et d’une pédagogie centrée sur l'élève favorisant l'apprentissage significatif, la résolution de problèmes et la pensée critique.
39. Les syndicats de l’éducation préconisent des mesures spécifiques de soutien aux personnels qui travaillent avec les élèves ayant des besoins particuliers. Dans de nombreux pays, les syndicats identifient et appuient des méthodes pédagogiques positives soutenant les jeunes ayant des besoins spéciaux et des difficultés comportementales.
40. Le droit d’apprendre dans la langue maternelle est reconnue par de nombreux instruments internationaux dont la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones (2007). Ceci implique que la planification de l’éducation doit prévoir suffisamment de personnels compétents et formés capables d’enseigner dans les langues pertinentes tel que préconisé par la recommandation de l’UNESCO sur le statut des enseignants. Les enfants devraient également avoir accès à un apprentissage multilingue – langue maternelle, langue régionale, nationale, officielle ou internationale – afin d’acquérir un panel complet de connaissances et compétences.
41. Tous les enfants et élèves ont le droit d'être représentés directement dans les processus de gouvernance des établissements, selon leur âge et leurs capacités. Tou(te)s ont le droit de s'organiser librement en entités reconnues légalement. Les élèves ne peuvent subir de conséquences scolaires, financières ou juridiques découlant de leur participation dans ces organisations. Chaque enfant et élève a le droit d'être informé de manière transparente sur ce qui concerne son éducation.
42. Une attention particulière doit être accordée au respect des droits des enfants consacrés par la Convention relative aux droits de l'enfant et ses protocoles concernant l'implication des enfants dans les conflits armés et concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, ainsi que d’autres normes contraignantes. La Convention relative aux droits de l'enfant souligne que tous les enfants doivent être protégés contre la négligence, la cruauté et l'exploitation; la Convention 138 de l'OIT affirme que le travail des enfants doit être éradiqué et que l'âge minimum admis pour l'emploi ne devrait pas porter préjudice à la scolarité. Les syndicats de l’éducation contribuent au respect et à la défense des droits fondamentaux des enfants en militant pour le droit universel à une éducation de qualité.