Malgré la COVID-19, les syndicats de l’éducation obtiennent des améliorations dans les conditions d’emploi et le statut de la profession
À l’occasion d’un webinaire organisé par l’Internationale de l’Éducation, près de 170 syndicalistes de l’éducation de 55 pays ont partagé leurs expériences positives dans le cadre de leurs efforts visant à garantir des conditions de travail décentes aux travailleur·euse·s du secteur.
Le 6 mai, l’Internationale de l’Éducation a invité les organisations affiliées à examiner comment, en pleine pandémie, des syndicats ont réussi à obtenir des droits supplémentaires pour les éducateur·trice·s.
Basil Manuel, directeur exécutif de la National Professional Teachers’ Organisation of South Africa(NAPTOSA) et modérateur du webinaire, a souligné que si des activités supplémentaires sont exigées aux éducateur·trice·s pendant la crise de la COVID-19, le moment est aussi propice pour qu’il·elle·s reprennent en main leur autonomie et leur développement professionnel.
Quatre intervenant·e·s des organisations affiliées ont fait un tour d’horizon des campagnes locales qui avaient porté leurs fruits. Les syndicalistes ont expliqué comment il·elle·s ont réussi à négocier des accords novateurs qui ont contribué à améliorer les conditions de travail, ainsi que le statut de la profession.
Suède : le dialogue social est crucial pendant la pandémie
« Parler de réussites est bon pour le moral, a fortiori par les temps qui courent », a déclaré Johanna Jaara Åstrand, présidente du syndicat suédois des enseignant·e·s Lärarförbundet et membre du Bureau exécutif de l’Internationale de l’Éducation.
Soulignant l’importance de maintenir le dialogue social pendant la pandémie, elle a précisé que les éducateur·trice·s suédois.es avaient mis en avant trois demandes principales :
- Pouvoir se rendre au travail sans crainte d’infection.
- La mise en place de mesures de sécurité dans tous les établissements éducatifs.
- Des attentes raisonnables, en phase avec les ressources disponibles.
Les représentant·e·s syndicaux·ales ont également demandé que les écoles soient fermées à titre préventif si nécessaire, a-t-elle ajouté.
Entre autres avancées, son syndicat a réussi à obtenir une indemnisation pour les travailleur·euse·s de l’éducation en chômage technique, des formations et des conseils pour les membres, ainsi qu’un soutien accru en matière de TIC et l’affectation de personnel de nettoyage supplémentaire.
Lärarförbundet a également demandé que la COVID-19 soit traitée à titre d’accident du travail.
Argentine : la convention relative aux enseignant·e·s sera étendue à tou·te·s les travailleur·euse·s du pays
« En Argentine, nous avons fait un énorme bond en avant », a déclaré Eduardo Pereyra, secrétaire aux relations internationales de la Confederación de Trabajadores de la Educación de la República Argentina(CTERA).
« Depuis mars de l’année dernière, les enseignants et enseignantes ont dû travailler en ligne et nous avons donc dû apprendre quelque chose que nous ne maîtrisions pas. Les enseignants et enseignante ont donc vu leur charge de travail augmenter considérablement et n’ont pas eu le temps de tout faire », a-t-il expliqué.
La CTERA a décidé de travailler sur une convention avec le gouvernement et le ministre de l’Éducation. Cette convention reconnaît notamment que dans le contexte de la pandémie, la charge de travail des enseignant·e·s a augmenté. En outre, elle garantit que les enseignant·e·s conserveront leur emploi, qu’il·elle·s pourront prendre congé en cas de maladie, qu’il·elle·s ont besoin de temps pour se déconnecter, qu’il·elle·s pourront prendre congé en cas de risque lié à la profession, qu’il·elle·s pourront être affilié·e·s à des syndicats et s’organiser, qu’il·elle·s disposeront de ressources et de formations suffisantes et qu’il·elle·s disposeront d’une infrastructure TIC/Internet adéquate.
Pereyra a expliqué que cet accord a préparé le terrain à une convention nationale plus large qui s’appliquera aux travailleur·euse·s de tout le pays.
Bahreïn : l’utilisation des réseaux sociaux est bénéfique pour les conditions d’emploi des enseignant·e·s
La vice-présidente de la Bahrain Teachers’ Association(BTA) et membre du Bureau exécutif de l’Internationale de l’Éducation, Jalila al-Salman, a souligné que l’utilisation des réseaux sociaux était le principal instrument de campagne et de communication de la politique de la BTA concernant la réouverture des écoles. Bien qu’il ait été déclaré illégal depuis dix ans au Bahreïn, l’affilié de l’Internationale de l’Éducation a néanmoins réussi à faire des percées importantes. Grâce au travail en réseau mené avec des alliés partageant les mêmes valeurs, la BTA a, en effet, réussi à faire adopter des politiques au sein du ministère de l’Éducation du Bahreïn, y compris en ce qui concerne la répartition des élèves dans les classes.
Al-Salman a souligné comment le Fonds de solidarité COVID-19 de l’Internationale de l’Éducation a été utilisé pour financer l’achat d’ordinateurs portables et d’abonnements Internet, soutenant ainsi l’éducation à distance dans le pays.
Mexique : propositions des éducateur·trice·s pour renforcer le syndicat et construire une base solide pour l’avenir
Raymundo Valdivia, du Sindicato Nacional de Trabajadores de la Educación(SNTE), a décrit comment son syndicat a conjugué ses efforts avec ceux de ses collègues dans tout le Mexique pour garantir la santé et la sécurité des éducateur·trice·s. Le SNTE s’est efforcé de trouver des moyens pour que les enseignant·e·s et les élèves puissent retourner à l’école en toute sécurité, a-t-il déclaré.
L’objectif du SNTE « était de revenir aux fondements du mouvement syndical au Mexique, en promouvant et en défendant les droits fondamentaux de tous les enseignants et enseignantes du Mexique ».
Le syndicat a sensibilisé le public aux défis posés à l’éducation par la pandémie de COVID-19, et les parents ont également été invités à prendre part à ses activités.
Il a précisé que les membres du SNTE ont fait un million de propositions, qui ont ensuite été envoyées au Président et aux ministères concernés.
Il s’est réjoui que son syndicat puisse contribuer à l’augmentation des salaires des éducateur·trice·s, à la mise en place d’une sécurité sociale pour les enseignant·e·s, à la vaccination de tou·te·s les enseignant·e·s et au renforcement des structures TIC à leur disposition.
Thématiques
Les participant·e·s ont ensuite eu des conversations thématiques dans le cadre de six sessions de groupe :
- Garantir des lieux de travail sains et sûrs par rapport à la COVID-19
- Formation et soutien à l’enseignement numérique, lignes directrices concernant l’introduction de nouvelles technologies, questions liées à la charge de travail
- Amélioration des conditions d’emploi, protection des salaires, prestations
- Protection de l’autonomie professionnelle et des libertés académiques
- Négociations avec les employeurs privés
- Les enseignant·e·s communiquent entre eux·elles
Dans sa conclusion, le modérateur a souligné que la pandémie avait augmenté la charge de travail des enseignant·e·s et a également augmenté le défi de fournir une éducation de qualité pour tou·te·s, par exemple dans l’apprentissage de l’utilisation de nouveaux outils et technologies, pour enseigner et assurer un environnement de travail sécurisé.
Les expériences positives sont parfois éclipsées par d’autres problèmes, mais avec le recul, les enseignant.e.s peuvent affirmer que l’expérience de la COVID-19 a eu certains effets positifs pour la profession, a-t-il déclaré.
Il s’agissait du troisième d’une série de webinaires organisés ces derniers mois par l’Internationale de l’Éducation, sur des questions liées à l’impact de la pandémie de COVID-19 dans le domaine de l’éducation.
Le précédent webinaire de la série s’était concentré sur les façons dont la COVID-19 continue d’affecter les conditions d’emploi dans le secteur de l’éducation.