Fidji : les « attaques dévalorisantes » de la ministre sur le professionnalisme des enseignant·e·s doivent cesser immédiatement
Le Fiji Teachers’ Union (FTU) exhorte les pouvoirs publics à mettre un terme à la dévalorisation des qualifications et du professionnalisme des éducateur·trice·s dans les médias publics.
FTU : les enseignant·e·s sont des professionnel·le·s qualifié·e·s
Dans un communiqué de presse, la ministre de l'Éducation, du Patrimoine et des Arts, Premila Kumar, a qualifié les enseignant·e·s de non qualifié·e·s. Elle les a exhortés à améliorer leurs qualifications en obtenant un diplôme de licence (bac +3), faute de quoi il·elle·s seraient remplacé·e·s par des diplômé·e·s universitaires. Kumar a expliqué que les qualifications des enseignant·e·s étaient liées à la revalorisation de leur salaire.
Le secrétaire général du FTU, Agni Deo Singh, a répondu aux affirmations de la ministre. « La ministre de l’Éducation poursuit ses attaques contre les enseignants et enseignantes et, cette fois-ci, elle parle d’enseignants non qualifiés, et visent les personnes ayant ont un certificat et un diplôme d’enseignement », a-t-il déclaré. « Cela est factuellement incorrect, car les qualifications de ce certificat et de ce diplôme sont reconnues depuis des décennies. Il n’existe aucune trace d’un ministre de l’Éducation, du Patrimoine et des Arts ayant déclaré le contraire. »
Le FTU considère que la déclaration du ministre est « insultante, désobligeante et démoralisante, et qu’elle témoigne d’un certain mépris à l’égard des enseignants et enseignantes », selon Singh. Il a ajouté que, jusqu’à présent, un·e enseignant·e du primaire devait posséder un certificat ou un diplôme pour débuter sa carrière et un·e enseignant du secondaire devait avoir un diplôme de niveau secondaire ou universitaire.
Le syndicat conteste également l’affirmation du ministre selon laquelle les enseignant·e·s qui améliorent leurs qualifications recevront une revalorisation salariale. Il explique que ses dossiers montrent que certain·e·s enseignant·e·s ont amélioré leurs qualifications en 2018 sans pour autant bénéficier d’un niveau de salaire plus élevé.
« Cela ressemble plus à une blague que la ministre ait l’intention de remplacer des titulaires expérimentés détenteurs de certificats et de diplômes par des personnes ayant une qualification plus élevée », a insisté Singh.
Le FTU souligne l’importance de la contribution des enseignant·e·s
Il a également souligné que :
- De nombreux·euses enseignant·e·s ont obtenu un certificat et un diplôme, car il s’agissait des qualifications fournies par les institutions de formation des enseignant·e·s qui étaient très reconnues à l’époque.
- Les enseignant·e·s ont suivi une formation intensive avant d’obtenir leur diplôme d’établissements de formation reconnus.
- De nombreux·euses enseignant·e·s ayant obtenu un certificat d’enseignement ont plus de 20 ans de service, une belle carrière et des performances remarquables, et occupent des postes de responsables d’établissement ou de directeur·trice·s adjoint·e·s.
- En 2006, l’université nationale des Fidji a commencé à proposer un diplôme d’enseignement, une autre formation rigoureuse de deux ans.
- Alors qu’il·elle·s ont consacré une part considérable de leur carrière d’enseignant au service des plus démunis, de nombreux enseignant·e·s des écoles éloignées et maritimes n’ont pas eu l’occasion d’améliorer leur qualification.
- En raison de l’absence de toute allocation budgétaire significative pour la formation continue, les enseignant·e·s n’ont pas eu la possibilité de poursuivre leurs études.
- Les enseignant·e·s, comme les autres citoyen·ne·s, ont des engagements financiers à respecter, il leur serait donc très difficile de prendre un congé sans solde pour reprendre des études.
- De nombreux enseignant·e·s ont pris leur retraite sans avoir obtenu de certificat ou de diplôme, mais il·elle·s ont joué un rôle essentiel dans l’éducation des jeunes. En plus d’être des éducateur·trice·s, il·elle·s ont rempli le rôle de conseiller·e pour les enfants dont il·elle·s avaient la charge.
La ministre de l’Éducation « crée des tensions et du stress inutiles », a regretté le responsable du FTU. « Elle doit faire preuve de respect envers nos enseignants et enseignantes. Ridiculiser ouvertement les enseignants, qui sont des bâtisseurs de la nation, n’est pas la solution et n’est pas juste. »
Singh a déclaré que le FTU l’exhorte à s’abstenir de faire des remarques sans fondement et à se familiariser avec le fonctionnement du système éducatif. Elle est la bienvenue pour rencontrer le syndicat, a-t-il conclu.
FTC : Préoccupations concernant les remarques « dévalorisantes » du ministre de l’Éducation
La Fiji Teachers Confederation (FTC) — dont le FTU et la Fiji Teachers' Association, également affiliés à l’Internationale de l’Éducation, sont membres — a également exprimé son mécontentement et sa consternation face aux commentaires de la ministre de l’Éducation qui « rabaissent nos enseignants et enseignantes ».
Tout en reconnaissant que le ministère se préoccupe du bien-être des élèves, la FTC a trouvé « surprenant que ses propres enseignants et enseignantes, qui veillent au bien-être de ces élèves, soient ridiculisés. Cela n’aide pas du tout à remonter le moral des enseignants et enseignantes ».
La FTC a poursuivi en soulignant que les enseignant·e·s ont travaillé dur pendant la pandémie de COVID-19, assurant « la continuité de l’apprentissage pendant cette période via des cours en ligne... De nombreux enseignants ont utilisé des fonds personnels pour acheter des données supplémentaires afin que l’enseignement et l’apprentissage en ligne puissent se poursuivre. »
La confédération syndicale a également rappelé que la Journée mondiale des enseignant·e·s a été célébrée le 5 octobre à Fidji, sous le thème « Les enseignant·e·s au cœur de la relance de l’éducation ». Elle insiste sur le fait que l’accent doit être mis sur le soutien aux enseignant·e·s afin qu’il·elle·s contribuent pleinement au processus de redressement.
Selon la FTC, « le refus d’accorder des augmentations de salaire durement gagnées et le non-paiement des indemnités aux enseignants et enseignantes est un acte de tricherie grossier de la part du ministère de l’Éducation et de l’État ».
Moral au plus bas pour la profession enseignante
Elle prévient également que le moral de la profession enseignante reste au plus bas, ce qui nuit à la fourniture d’une éducation de qualité par les enseignant·e·s. « Les enseignants et enseignantes ne sont pas des magiciens. Ce sont des éducateurs et éducatrices et ils doivent bénéficier du soutien nécessaire pour assurer une éducation de qualité. »
Considérant que la ministre Kumar « ignore totalement la réalité du terrain et les défis auxquels sont confrontés les enseignants et enseignantes au quotidien, alors qu’ils travaillent avec passion pour aider les élèves dont ils ont la charge », la FTC a noté que « si elle s’était donné la peine d’obtenir des informations factuelles sur les classes nombreuses dans les écoles urbaines, elle aurait compris la nécessité de nommer davantage d’enseignants et enseignantes ».
La confédération a conseillé à la ministre de l’Éducation « de vérifier les faits et de s’abstenir de faire des commentaires dévalorisants dans les médias, car elle ne fait que nuire ». Elle a réaffirmé sa volonté de travailler en partenariat avec la ministre de l’Éducation, du Patrimoine et des Arts pour améliorer la qualité de l’éducation. « Toutefois, nous ne tolérerons aucune tentative de rabaisser ou de menacer publiquement nos membres ou de les traiter injustement », a-t-elle insisté.