Les organisations syndicales se penchent sur la nouvelle constitution du Chili et son importance pour la région d’Amérique latine
L’article 35 de la nouvelle proposition constitutionnelle consacre la reconnaissance du droit à l’éducation.
Le 5 août, les travailleur·euse·s de l’éducation appartenant aux organisations syndicales chiliennes membres de l’Internationale de l’Éducation pour l’Amérique latine (IEAL) ont reçu la visite d’une délégation du Comité régional de l’IEAL. Celle-ci avait pour mission d’engager une réflexion sur l’importance de la nouvelle Constitution politique du Chili pour la région.
Ont participé à cet événement politique Hugo Yasky, président du Comité régional de l’IEAL et secrétaire général de la CTA d’Argentine ; Fatima Silva, vice-présidente de l’IEAL et secrétaire générale de la Confederação Nacional dos Trabalhadores em Educação du Brésil (CNTE) ; Roberto Leão, vice-président de l’Internationale de l’Éducation pour l’Amérique latine ; Combertty Rodriguez, coordinateur principal du Bureau régional de l’IEAL ; Eduardo Pereyra, secrétaire des relations internationales de la Confederación de Trabajadores de la Educación de la República Argentina (CTERA) d’Argentine et José Olivera, président de la Federación Nacional de Profesores de Educación Secundaria (FeNaPES) d’Uruguay.
La rencontre a débuté par des messages en provenance du monde entier, dans lesquels les dirigeant·e·s de différentes organisations syndicales ont manifesté leur soutien au processus en cours au Chili, en amont du plébiscite du 4 septembre prochain.
Le premier de ces messages était celui de David Edwards, secrétaire général de l’Internationale de l’Éducation (IE), qui a exprimé sa solidarité en déclarant que « le peuple chilien a d’ores et déjà écrit une page de l’histoire en créant une constitution qui comporte des avancées importantes pour l’éducation publique, les droits des femmes et les peuples indigènes ».
« Avec cette nouvelle constitution, l’éducation chilienne marque une rupture avec les modèles néolibéraux centrés sur le profit, qui ont conduit le pays à des inégalités sociales terribles. Désormais, l’éducation sera considérée comme un droit social pour toutes et tous et sera financée par l’État, grâce à l’instauration d’un accès universel à l’éducation à tous les niveaux et à son caractère obligatoire, du niveau le plus fondamental à l’enseignement secondaire », a-t-il souligné.
Les représentant·e·s des organisations syndicales chiliennes qui ont organisé l’événement avec le concours de l’IEAL ont ensuite procédé à son ouverture officielle.
Carlos Diaz, président du Colegio de Profesores y Profesoras au Chili, a relevé le caractère participatif du processus d’élaboration de la nouvelle Constitution. « Nous sommes fiers d’avoir une Constitution qui consacre l’éducation à titre de droit fondamental et qui répond à bon nombre des problèmes que nous avons rencontrés en tant que pays », a-t-il souligné.
De son côté, Yobana Salinas, présidente du Sindicato Nacional de Trabajadores N°2 de Integra (SINDIDOS), a souligné que « le monde regarde notre lutte avec espoir, personne n’est indifférent, en particulier nos camarades d’Amérique latine ». Elle a également insisté sur la solidarité des travailleur·euse·s de l’éducation du continent organisé·e·s au sein de l’IEAL.
Enfin, Carlos Gomez, président de la Federación Nacional de Asociaciones de Académicos de Universidades Estatales du Chili (FAUECH), a souligné que l’égalité d’accès à l’éducation est une promesse attendue depuis des décennies, qui a été repoussée par la dictature et ses suites, et qui peut enfin devenir une réalité grâce à l’adoption de cette nouvelle Constitution : « À partir du 4 septembre, nous commencerons à reconstruire une société fraternelle, solidaire et inclusive ».
Un triomphe pour toute l’Amérique latine
Après ces exposés, la parole a été donnée aux membres de la délégation internationale. La première intervention a été celle de Fatima Silva qui a mis l’accent sur l’histoire commune des pays d’Amérique latine et sur la pertinence de la nouvelle Constitution dans le contexte actuel.
« La nouvelle constitution arrive à un moment où le système privé essaie de plus en plus de faire des affaires avec l’État et où, dans toute l’Amérique latine, on cherche à usurper le rôle de l’État dans les politiques publiques. Le fait qu’une assemblée constituante soit élue par le peuple n’est, en soi, pas une mince affaire. La nouvelle constitution s’attache à valoriser la chose publique, les politiques de l’État et l’État lui-même en tant qu’agent ayant pour devoir de garantir les droits de sa population. Il s’agit là de l’aboutissement de ce processus que vous avez construit », a-t-elle déclaré.
José Oliveira a rappelé que la victoire du POUR sera non seulement une étape importante pour le Chili mais « marquera une nouvelle ère pour l’Amérique latine en général ».
Le dirigeant syndical uruguayen a souligné qu’il est nécessaire de voter POUR parce que le nouveau texte « implique un tournant disruptif qui rompt avec ce qui a été proposé dans le cadre des réformes des années 80, lesquelles continuent de dominer au niveau de la région, (...). Aussi, la proposition définit-elle un nouveau cadre institutionnel qui énonce clairement les compétences de l’État en tant qu’organe directeur, en proposant l’interdiction de la recherche du profit dans l’enseignement, (...) car le fait de trouver un ensemble d’articles qui revalorisent la profession enseignante est remarquable dans ce contexte. »
L’événement s’est clôturé avec l’intervention d’Hugo Yasky, président du Comité régional de l’IEAL, qui a rappelé que « rien de ce qui se passe dans nos pays n’est sans rapport avec le sort de l’ensemble de nos peuples. (…) Si le POUR l’emporte le 4 septembre, cette victoire représentera un nouveau modèle émergeant du Chili pour le reste de l’Amérique latine. »
Il a également souligné le rôle du peuple chilien dans l’élaboration de ce texte : « Si aujourd’hui nous discutons de cette proposition de constitution, c’est parce que des luttes ont été menées. Ce n’est pas parce qu’elle est tombée du ciel ou parce qu’un groupe de juristes l’a définie. C’est le peuple qui est descendu dans la rue pour faire front face à la répression. Et c’est cette construction collective qui donne toute sa valeur à cette constitution. »
Outre les exposés des participant.e.s présent.e.s à l’événement, des messages de soutien ont également été transmis par Daaiyah Bilal-Threats, directrice politique principale de la National Education Association (NEA) des États-Unis ; Angelo Gavrielatos, président de la NSW Teachers Federation d’Australie ; Roberto Trochez, membre du Comité exécutif mondial de l’IE et représentant du COLPROSUMAH du Honduras ; Juan Gabriel Espinola, secrétaire général adjoint de l’OTEP-A du Paraguay ; Israel Montano, secrétaire général du syndicat ANDES 21 de junio du Salvador ; et Evelyn DeJesus, vice-présidente exécutive de l’American Federation of Teachers (AFT).