Pour la défense de l’éducation publique
Restez à jour
Abonnez-vous à la lettre d’information Mondes de l’Éducation.
Restez à jour
Abonnez-vous à la lettre d’information Mondes de l’Éducation.
Merci de votre abonnement
Une erreur est intervenue
Cet article présente des extraits du discours prononcé au National Press Club, le 28 mars 2023.
La promesse et la mission de l’éducation
Selon un dicton, il n’est pas nécessaire de tout aimer chez une personne pour l’aimer. Je suis sûre que mon épouse n’aime pas tout de moi, mais cela ne l’empêche pas de m’aimer. (Pour ma part, j’aime absolument tout chez elle.) Rien n’est parfait. Les banques ne sont pas parfaites. Le congrès n’est pas parfait. Et nos écoles publiques ne le sont pas non plus. Pas même nos écoles les plus performantes et les mieux financées. Celles et ceux d’entre nous qui travaillent dans les écoles publiques font tout leur possible pour les renforcer et faire en sorte qu’elles soient les meilleures possible. Mais seules les écoles publiques ont pour mission d’offrir des opportunités à chaque élève. Comme l’indiquent pratiquement toutes les conversations, sondages, études ou élections, la majorité des parents et de la population apprécient les écoles publiques. Ils les valorisent, en ont besoin et les soutiennent. Et un nombre incalculable d’Américaines et d’Américains y sont favorables.
Les écoles publiques sont plus que des structures physiques. Elles sont l’expression de nos valeurs civiques et de nos idéaux : l’éducation est à ce point importante pour les individus et la société qu’elle doit être gratuite et accessible à tout le monde. Chaque jeune doit se voir offrir la possibilité de se préparer à la vie, à l’université, à sa carrière et la citoyenneté. Au sein d’une société pluraliste comme les États-Unis, il nous faut apprendre à surmonter les différentes croyances et cultures d’autrui. Et, comme le pensaient nos fondateurs, il nous faut des citoyens et des citoyennes éduqué·e·s pour protéger notre démocratie contre les démagogues. (…)
Dès lors que les enfants vont à l’école ensemble, ils et elles font partie d’une communauté, leurs familles font partie d’une communauté, laquelle se réunit pour assister aux concerts organisés par les écoles, aux matchs de basket-ball ou aux foires scientifiques, pour offrir abri et réconfort aux personnes déplacées à la suite de catastrophes naturelles ou, bien trop souvent, lors de veillées en hommage aux victimes de fusillades dans les écoles. Que ce soit dans les bons ou les mauvais moments, les écoles publiques sont le ciment même de nos communautés, de notre démocratie, de notre économie et de notre pays.
Mais certaines personnes souhaitent que cet édifice s’effondre et le pilonnent à coup de massue.
L’éducation publique et la démocratie prises pour cibles
Les atteintes portées à l’éducation publique ne sont pas nouvelles. La différence aujourd’hui est qu’elles ont pour but de la détruire. D’en faire un champ de bataille, une arme politique. Après la défaite du président Trump à sa propre réélection, Steve Bannon, son principal allié, a déclaré que leur combat passait par les conseils scolaires. Dans un discours tenu l’an dernier, Christopher Rufo, agent de la guerre culturelle désigné par le gouverneur Ron DeSantis, a déclaré sans détour que pour pouvoir offrir un choix d’écoles universel, il fallait commencer par se méfier des écoles publiques et que, à cette fin, son camp devait se montrer impitoyable et brutal.
Et j’ajouterais qu’il doit être bien financé, ce qui ne fait aucun doute. Les fondations familiales DeVos, Bradley, Koch, Uihlein et Walton, pour ne citer que celles-là, ont versé des millions de dollars à des organisations opposées à l’éducation publique et favorables à la privatisation, comme l’ American Federation for Children et EdChoice.
Le clan Betsy DeVos du mouvement pour la privatisation des écoles élabore méthodiquement son plan. Priver les écoles publiques des fonds dont elles ont besoin pour fonctionner efficacement. Critiquer leurs lacunes. Ébranler la confiance dans les écoles publiques en alimentant les peurs et les divisions, notamment en cherchant à monter les parents contre les enseignantes et les enseignants. Remplacer les écoles publiques par des écoles privées, confessionnelles, en ligne ou à domicile. Tout cela dans le but de démanteler l’éducation publique telle que nous la connaissons, de fragmenter et de balkaniser l’éducation en Amérique, de s’attaquer aux plus vulnérables d’entre nous et de laisser les élèves ayant les plus grands besoins dans les écoles publiques ayant le moins de ressources.
Ce projet extrémiste est porté par une minorité très active dans notre pays. Tout cela nuit au travail que nous devons accomplir, à savoir offrir une éducation à près de 50 millions d’enfants qui fréquentent nos écoles publiques. Et au travail urgent qui consiste à aider nos enfants à se relever des pertes d’apprentissage, de la tristesse, de la dépression et des autres conséquences de la pandémie.
Ce n’est ni ce que veulent les parents, ni la population.
Mais revenons tout d’abord à la suppression du financement. Rien que cette année, 29 assemblées législatives d’État examinent des projets de loi visant à créer des programmes de bons d’études ou à les élargir. Ceci vient s’ajouter aux 72 programmes de bons d’études et de crédits d’impôt qui, dans 33 États, subventionnent déjà l’enseignement privé et à domicile, à hauteur de plusieurs milliards de dollars chaque année. Ces programmes de bons d’études ne cessent de proliférer, alors que les recherches montrent que, en moyenne, ils ont une incidence négative sur les résultats scolaires, leur chute étant pire encore que les déficits d’apprentissage dus à la pandémie. En réalité, les bons d’études sont à l’origine de certains des résultats scolaires les plus faibles jamais enregistrés par la recherche.
Les défenseurs des bons d’études ont toujours affirmé que ces derniers permettaient aux familles à faibles revenus ou appartenant à des minorités de sortir leurs enfants des écoles peu performantes. Mais ce n’est plus le cas. Aujourd’hui, ils sont attribués à des familles dont les enfants fréquentent déjà des écoles privées. De plus, ces écoles échappent à la plupart des lois fédérales relatives aux droits civils qui protègent les élèves, si bien qu’elles peuvent se montrer discriminatoires, et beaucoup le sont, à l’égard des élèves LGBTQ ou ayant des besoins spéciaux.
Le programme de bons d’études universels signé en mars par le gouverneur de Floride DeSantis détournera 4 milliards de dollars du budget d’État réservé aux écoles publiques. La Floride se classe au 44e rang national pour les dépenses par élève et au 48e pour le salaire moyen du personnel enseignant. DeSantis utilise l’argent du contribuable à mauvais escient.
Et puis, il y a les guerres culturelles. Ce qui a commencé comme une lutte pour des mesures de sécurité à l’époque de la pandémie s’est transformé en une campagne de la peur : déclarations fallacieuses selon lesquelles les écoles primaires et secondaires enseigneraient la « théorie critique de la race », déclarations détestables et infondées affirmant que les enseignantes et les ensiengnants conditionnent et endoctrinent leurs élèves et que les écoles promeuvent un agenda « woke », sans jamais définir, ou vouloir définir, ce qu’elles entendent par là. Interdire certains livres et intimider les élèves vulnérables. Les réunions des conseils d’administration des établissements scolaires se transforment en joutes oratoires. Il s’agit d’une volonté délibérée, organisée et dangereuse de nuire aux écoles publiques.
Au cours de ces trois dernières années, les responsables politiques de 45 États ont proposé des centaines de lois où les écoles publiques se retrouvent au centre de guerre culturelles : lois visant à interdire des livres dans les bibliothèques, y compris ceux consacrés à Ruby Bridges, Anne Frank et Roberto Clemente ; lois restreignant ce que peuvent enseigner les personnels et ce que peuvent apprendre les élèves, notamment en ce qui concerne la race, le genre, les LGBTQ, l’actualité et l’histoire américaine ; et lois s’attaquant aux élèves transgenres. Les élèves et le personnel sont censé·e·s être bien accueilli·e·s, en sécurité et respecté·e·s dans leurs écoles, mais les guerres culturelles alimentent les hostilités et les craintes. (...)
Tout cela nuit à l’enseignement de qualité que peuvent offrir les personnels à leurs élèves et érode la confiance et les relations, qui sont si importantes. Le personnel enseignant ne doit-il pas être libre de parler avec les élèves en repli ou en détresse et être libre de répondre à leurs questions ? Ne souhaitons-nous pas que nos élèves connaissent les réussites de notre nation qui font notre fierté et les échecs qui nous poussent à nous améliorer ? N’est-ce pas là notre travail ?
Les enseignantes et les enseignants devraient avoir la liberté d’enseigner. Et les élèves, celle d’apprendre.
Climat et culture de l’école
Notre pays traverse une période difficile. Les conséquences de la COVID-19, les conflits, la toxicomanie, la violence armée, l’insécurité économique, ainsi que la crise de la santé mentale parmi les jeunes, ont fait des ravages. Les crimes de haine se sont multipliés contre nombre de citoyennes et citoyens des communautés asiatiques, afro-descendantes, latino, juives ou musulmanes.
Le personnel des écoles signale une recrudescence du harcèlement, des altercations verbales et de la violence physique parmi les élèves, ainsi que ces types de comportements dirigés contre eux·elles-mêmes.
Je me souviens d’une enseignante qui affirmait que lorsque ses élèves perturbaient son cours, ce n’était pas en raison de leurs mauvaises performances mais en raison de leur tristesse.
Tant d’élèves ont souffert de l’isolement et subi des traumatismes. Il faut les aider. Mais les effectifs de spécialistes de la santé mentale était déjà insuffisant avant la pandémie, et leur pénurie est aujourd’hui critique.
La diabolisation systématique du personnel enseignant et le manque de respect à son égard, depuis les hurlements lors des conseils scolaires aux déclarations de l’ancien secrétaire d’État les accusant d’enseigner des « obscénités » ont contribué à instaurer une culture de l’irrespect qui percole aujourd’hui dans les écoles.
Crise de la profession enseignante
Déjà avant la pandémie, la satisfaction professionnelle des enseignantes et des enseignants était en baisse. Leur niveau de satisfaction a chuté de 62 % en 2008 à 12 % en 2022.
Le stress lié à la période COVID, auquel s’ajoutent les guerres culturelles, les atteintes portées aux personnels, l’insuffisance des salaires, les mauvaises conditions d’enseignement et d’apprentissage, ainsi que les menaces de fusillades dans les écoles, sont autant de facteurs qui ont fait que ces dernières années auront été les plus difficiles de l’histoire moderne pour les enseignantes et les enseignants.
Bien avant la pandémie, près de 300 000 collègues abandonnaient la profession chaque année. Nous en sommes aujourd’hui à 400 000.
Et le réservoir se tarit, les étudiantes et les étudiants, ainsi que le personnel en quête de réorientation professionnelle ne se tournant plus vers l’enseignement. Comment allons-nous pouvoir recruter et maintenir en service le personnel dont ont besoin nos écoles dans un tel climat ?
Notre profession enseignante est en crise.
Elle est en crise à cause des mauvaises conditions d’enseignement et d’apprentissage résultant du financement inadéquat des écoles publiques. À cause des salaires qui, au cours de ces 40 dernières années, ont chuté par rapport aux rémunérations des autres diplômé·e·s de l’enseignement supérieur. À cause de toutes les accusations portées contre les enseignantes et les enseignants et du peu d’autorité qui leur est accordée. À cause de la déprofessionnalisation de l’enseignement, qui démoralise une profession déjà mise à mal.
J’entends cela tout le temps : les enseignantes et les enseignants souhaitent simplement enseigner.
Stratégies pour une éducation efficace
Alors, où allons-nous ? (...)
Quatre stratégies peuvent nous aider à transformer nos écoles pour honorer les promesses et rencontrer les objectifs de l’éducation publique. Pas uniquement pour rattraper les pertes d’apprentissage ou revenir à la normale, mais pour réellement permettre à tous nos enfants d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires pour leurs études, leur carrière et leur vie de citoyen. Ces stratégies peuvent nous aider à créer des environnements sûrs et accueillants, et à rétablir le plaisir de l’apprentissage. Et, dans un même temps, elles ont un effet catalyseur. J’ai pu constater que cela fonctionnait. Mais ces stratégies doivent être déployées à grande échelle, pour chaque élève, dans chaque école. (...)
Community schools
Avant tout, nous devons assurer le bien-être de nos élèves. C’est pourquoi les écoles doivent occuper une place centrale au sein de la communauté, où les cours sont associés à des possibilités d’apprentissage plus larges et à des événements familiaux et communautaires, et intégrer des services médicaux, de santé mentale, ou autres. C’est le meilleur système que je connaisse pour permettre aux élèves et aux familles de bénéficier du soutien nécessaire pour apprendre, mener leur vie et s’épanouir.
Une récente étude réalisée par le CDC a révélé que le nombre de tentatives de suicide avait augmenté de 22 % durant la pandémie. (...)
Que faut-il faire ? Selon cette même étude, le sentiment d’appartenance à la communauté scolaire, c’est-à-dire le fait de se sentir proche des autres au sein d’une école, a un effet protecteur à long terme sur les jeunes, jusqu’à l’âge adulte.
Nos écoles doivent avoir les moyens de soutenir les élèves et de s’en rapprocher. Pour y arriver, il n’existe pas de meilleur modèle que les écoles placées sous la gestion de la communauté locale ( community schools). Une autre réalité tragique sévit aux États-Unis : la moitié des élèves des écoles publiques américaines vivent dans la pauvreté. Les écoles communautaires atténuent les effets de la pauvreté en assurant les services essentiels là où se trouvent les élèves et leurs familles.
À partir du moment où leurs besoins physiques et émotionnels sont satisfaits, les élèves sont disponible pour apprendre et les enseignantes et les enseignants peuvent se concentrer sur leur mission première, qui est celle d’enseigner. (...)
Les membres de l’AFT ont contribué à la création de 700 community schools dans le pays et nous constatons qu’elles répondent aux besoins des enfants, que ce soit l’école primaire Kimball à Washington, l’école Oyler à Cincinnati, ou encore, l’école primaire Roybal-Allard de Los Angeles. Raison pour laquelle l’AFT réclame la création de 25 000 community schools d’ici 2025, un appel qui ne cesse de gagner l’adhésion de la population. La Californie vient d’approuver un nouveau montant de 45 millions de dollars pour transformer une école sur trois en community school au sein de l’État. Le budget du président Biden double l’investissement fédéral dans ces écoles. Nous devons faire en sorte que cela se produise partout.
Apprentissage par l’expérience
Deuxièmement, nous pouvons remotiver les élèves à travers l’apprentissage par l’expérience, en modifiant leurs expériences pédagogiques. Pourquoi nos enfants sèchent les cours ou s’endorment au fond de la classe ? Ils ou elles se sentent peut-être en danger ou invisibles. Ou sont peut-être simplement désintéressé·e·s. Nous devons faire mieux. Et nous en sommes capables.
Bien sûr, les matières fondamentales sont importantes. Mais la façon dont nous les enseignons l’est tout autant. L’apprentissage par l’expérience plonge les élèves dans la résolution des problèmes, la réflexion critique, le travail en équipe et l’apprentissage par la pratique. Nous devons aider nos enfants à entrer dans le monde, avec leurs idées, ensemble, pas uniquement dans leur coin avec leurs dispositifs numériques.
L’apprentissage par l’expérience comporte tous les éléments susceptibles de motiver les enfants à aller à l’école. L’enthousiasme face à un apprentissage motivant, la joie d’être ensemble, en particulier après l’isolement de ces dernières années. La camaraderie et la responsabilité que suppose le travail en équipe.
À l’ère de l’Intelligence Artificielle et de ChatGPT, ce type d’apprentissage est d’une importance cruciale pour pouvoir penser et écrire, résoudre des problèmes, appliquer des connaissances et faire le tri entre la réalité et la fiction.
L’apprentissage par l’expérience peut s’appliquer à n’importe quel domaine, des mathématiques à l’informatique, en passant par les sciences sociales, et permet souvent de tisser des liens entre les matières pour créer un enseignement interdisciplinaire puissant. Il peut être adapté à tous les degrés de l’enseignement. Tant en milieu rural que dans les centres urbains ou suburbains. Il nourrit la curiosité et la créativité naturelles des enfants. C’est ce que font en permanence les professeur·e·s de robotique et d’argumentation. C’est ce que moi-même j’ai fait en tant qu’enseignante dans le cadre du programme Advanced Placement (AP) au lycée Clara Barton. Ces opportunités doivent être la norme et non l’exception.
Ce type d’apprentissage démontre clairement à quel point le système de responsabilisation basé sur des tests normalisés est obsolète. Il est évident que le pays a besoin de données concernant les performances de nos élèves. Toutefois, les études montrent que le meilleur indicateur de la réussite des élèves, ce sont les notes obtenues en classe et non les tests. L’apprentissage par l’expérience permet d’élever la classe à un niveau supérieur.
L’apprentissage par l’expérience est évalué par l’enseignante ou l’enseignant en classe et vise en premier lieu la maîtrise de la compétence enseignée. Il peut s’agir d’un projet de fin de cycle, où les élèves travaillent sur un sujet qui les passionne et le présentent à leurs professeur·e·s et aux autres élèves. Il peut s’agir d’un éveil à la nature dans les écoles maternelles, où les enfants apprennent à explorer leur environnement naturel en développant leurs compétences sociales avec les autres enfants. Il peut aussi s’agir d’élèves qui travaillent ensemble à la création de programmes ou de projets de robotique, de projets d’apprentissage par le service pour soutenir les membres de la communauté, ou qui participent à des stages d’été dans une ferme pour s’occuper des récoltes ou des animaux, ou qui réalisent un reportage ou un bulletin d’information dans leur quartier. Cela peut commencer par des activités sur le terrain, pendant et après l’école.
L’apprentissage par l’expérience est depuis longtemps intégré aux programmes de l’enseignement professionnel et technique, amenant les élèves à faire travailler leur cerveau et leurs mains pour tout apprendre, de la réparation automobile aux soins infirmiers, en passant par les technologies de l’information, la conception graphique, le soudage, ou encore, les compétences culinaires. Les élèves de l’enseignement technique professionnel acquièrent les compétences nécessaires pour entrer à l’université ou débuter dans leur carrière. Chaque élève ne devrait-il·elle pas avoir cette chance ? (...)
Demandez à n’importe quel·le employeur ou employeuse les compétences et les connaissances les plus recherchées, qu’il s’agisse de plomberie, de soins de santé ou d’assistance légale, et vous entendrez certainement des similitudes : créativité, autonomie, esprit critique, capacité à résoudre des problèmes, empathie et compétences relationnelles. Ce type d’apprentissage offre à chaque élève davantage d’options pour développer toutes ces compétences et découvrir sa passion, atteindre ses objectifs et tracer son chemin vers des emplois de qualité et des carrières épanouissantes.
Faire revivre la profession enseignante
Troisièmement, afin que nous puissions répondre aux besoins des 50 millions d’enfants inscrits dans nos écoles publiques, nous devons redynamiser la profession enseignante. Et nous devons commencer par remédier aux pénuries de personnel enseignant et d’effectifs dans les écoles. Et prendre soin des enseignantes et des enseignants qu’il nous reste.
Et nous savons comment faire. Lors de notre assemblée de 2022, les membres de l’AFT ont approuvé à l’unanimité le rapport sur lequel a travaillé durant sept mois notre groupe de travail chargé d’étudier les pénuries de personnels dans les écoles. Ce rapport est un projet présentant des solutions modulables que chaque district et État peut mettre en œuvre, où les personnels enseignants sont considérés comme des professionnel·le·s, se voyant accorder des salaires décents, du temps pour préparer leurs cours, des possibilités de participer à des programmes de développement professionnel pertinents et l’autorité de prendre des décisions au quotidien dans leurs classes. Tout en veillant à leur offrir les conditions propices à l’apprentissage : bâtiments en bon état, ventilation sûre et moins d’élèves par classe.
La Fédération des enseignantes et des enseignants de Kansas City a récemment négocié un nouveau contrat en s’appuyant sur ce rapport de l’AFT consacré aux pénuries d’effectifs dans l’enseignement. Désormais, chaque professeur·e sera encadré·e, au cours de sa première et deuxième année d’exercice par un ou une collègue exemplaire, rémunéré·e pour son rôle d’accompagnement. Le syndicat est parvenu à obtenir les salaires de départ les plus élevés de la région et des augmentations pour maintenir les personnels dans la profession, ainsi qu’un congé familial rémunéré pour les parents, ce qui en fait le premier district de l’État à garantir une prestation familiale essentielle. Qui veut, peut. (...)
Les parents et la communauté sont nos partenaires
Quatrièmement, la pandémie nous a montré ce que nous savions depuis toujours : l’apprentissage en personne est essentiel pour les enfants, et les écoles publiques sont au centre de leurs communautés.
Il est plus qu’évident que les liens entre l’école et les familles et entre les personnels et les parents sont essentiels à la réussite des élèves. Mais face à ceux et celles qui cherchent à rompre ces liens, il nous faut les renforcer.
C’est pourquoi l’AFT a créé le Powerful Partnerships Institute, chargé de renforcer la participation des familles et des communautés. Au cours de sa première année d’existence, cet institut a accordé 27 subventions à des sections locales de l’AFT partout dans le pays. L’État du Montana mobilise des milliers de familles et de personnels qui défendent l’éducation publique. La ville de New Haven collabore avec les personnels, les familles et les élèves pour assurer un financement équitable des écoles. (…)
Soyons exemplaires dans notre façon de gérer les conflits et les désaccords. Durant la pandémie, via la plateforme Zoom, nous avons rencontré des groupes de parents souvent en désaccord avec nous concernant les mesures de sécurité COVID-19 et les fermetures d’écoles. Nous nous sommes écouté·e·s et avons discuté. Nous avons besoin de cela plus souvent en Amérique.
Il y a deux ans, l’AFT a augmenté son fonds de défense juridique afin de pouvoir venir en aide aux membres mis en danger après avoir enseigné des vérités historiques ou répondu à des questions de leurs élèves. Mais, en de trop nombreux endroits, il n’y a pas de syndicats, pas d’organisations éducatives ou d’associations de parents. Les personnes se sentent seules et isolées. Professeur·e·s. Parents. Élèves.
Raison pour laquelle, en collaboration avec la Campaign for Our Shared Future, nous lançons une nouvelle ligne directe, Freedom to Teach and Learn, que peuvent utiliser les parents et les élèves en cas de besoin. C’est là qu’il faut appeler si on vous dit de retirer un livre du programme scolaire ou de la bibliothèque, s’il vous est interdit d’aborder certains sujets dans votre classe, si vous ne pouvez pas enseigner en toute honnêteté ou de manière appropriée, si les responsables politiques de votre district ou de votre État s’en prennent aux groupes d’élèves vulnérables pour avancer leurs pions sur l’échiquier politique. (...)
Ces quatre stratégies sont toutes efficaces en elles-mêmes. Mais ensemble, elles ont un pouvoir transformateur. Les community schools permettront aux jeunes de se relever de ces années pénibles et de s’extraire de la pauvreté, mais aussi de s’épanouir. L’apprentissage par l’expérience préparera nos jeunes à acquérir les connaissances et les compétences nécessaires pour saisir les opportunités que leur offre une économie en pleine mutation. Pour nourrir et former nos jeunes, il nous faut un personnel enseignant qui soit soutenu, respecté et rémunéré à la juste valeur de sa mission essentielle. Et il faut que l’entourage des élèves − famille, professeur·e·s et membres de la communauté − s’unisse pour apporter ce soutien.
Conclusion
C’est notre mission. Mais cela ne peut pas être uniquement le travail de notre syndicat ou du personnel des écoles et des établissements scolaires. C’est le travail d’une grande nation de veiller à ce que les besoins humains fondamentaux de nos enfants soient satisfaits pour qu’ils soient disponibles pour apprendre et réaliser leur plein potentiel. Remplacer les méthodes d’enseignement et d’apprentissage obsolètes centrées sur les tests par des approches efficaces et attrayantes qui motivent les élèves et les préparent à réaliser leurs rêves et leurs aspirations.
Nos écoles publiques ne peuvent pas devenir le jeu des ambitions des responsables politiques. Ou être privées de financement et démantelées par des idéologues.
Nous sommes à la croisée des chemins. Peur et division ou espoir et opportunités.
Une grande nation ne craint pas d’éduquer ses citoyennes et ses citoyens.
Une grande nation ne craint pas le pluralisme.
Une grande nation échappe au fléau des armes à feu.
Une grande nation cultive la liberté, la démocratie, l’égalité et les opportunités.
Et tout cela commence dans nos écoles publiques. Nous sommes cette grande nation et nous devons agir ensemble pour défendre, soutenir et renforcer nos écoles publiques. Et nous devons le faire maintenant.
Ne fût-ce que pour nos enfants, qui ne méritent pas moins que ça.
Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.