Maroc : augmentation du statut de la profession enseignante et réforme du système éducatif, principaux axes du travail syndical
Le Syndicat national de l'enseignement–Confédération démocratique du Travail (SNE-CDT) est engagé depuis quelques années dans des négociations avec le gouvernement en vue d’améliorer les conditions de vie et de travail des éducateur·trice·s marocain·e·s et travaille à une réforme globale du système éducatif du pays pour mettre fin aux inégalités qui y perdurent.
Dialogue social sur la profession et le statut enseignants
Pour Younes Firachine, jeune secrétaire général nouvellement élu du SNE-CDT, « au Maroc, depuis l'élection du nouveau gouvernement en 2021, nous avons entamé une nouvelle phase de dialogue social sérieux et responsable. Le gouvernement et les syndicats de l'enseignement sont en effet convaincus que l'enseignement public au Maroc a besoin de réformes profondes en raison des résultats décevants obtenus dans les évaluations nationales et internationales. »
Le SNE-CDT considère que « l'approche fondamentale pour réformer le système éducatif marocain est d'améliorer les conditions matérielles, sociales et professionnelles des enseignantes et enseignants de toutes catégories ».
Il estime par ailleurs impossible de mettre en œuvre une réforme sans mobiliser les acteur∙trice∙s essentiel∙le∙s, tels que les enseignant∙e∙s, les directeur∙trice∙s et autres professionnel∙le∙s de l'éducation, surtout que le secteur connaît « une tension aiguë » en raison de la détérioration de la situation sociale et statutaire des enseignant∙e∙s, ainsi que de l'accumulation de revendications.
De plus, il y a un problème lié à l'emploi des enseignant∙e∙s contractuel∙le∙s, a ajouté le dirigeant syndical. Ce mode d'emploi a été lancé en 2016 et le nombre de contractuel∙le∙s est maintenant de 120.000, sur un total de 300.000 employé∙e∙s dans le secteur.
Ainsi, une commission technique conjointe entre les syndicats et le ministère de l'Éducation nationale a été formée, qui a tenu des réunions pendant 9 mois, au cours desquelles elle a examiné les expériences internationales en matière d'organisation de la profession et de régimes fondamentaux des enseignant∙e∙s dans ces pays.
Nous avons ensuite dressé un diagnostic des principaux déséquilibres du système actuel et sommes parvenus à un accord signé le 14 janvier 2023, qui définit les principes généraux du nouveau régime de base et inclut également plusieurs dossiers catégoriels, a noté Firachine.
Ce nouveau régime de base, dont les articles sont en cours de rédaction, entrera en vigueur à partir de septembre 2023. Il préserve les acquis actuels et ouvre de nouvelles perspectives professionnelles pour améliorer les conditions sociales et professionnelles des enseignant∙e∙s, notamment en créant un grade pour l'avancement de plus de 200.000 enseignant∙e∙s, en augmentant les indemnités, en offrant des incitations aux enseignant∙e∙s, en créant des emplois et en promouvant les assistant∙e∙s administratif∙ive∙s et techniques.
Firachine a mis en avant le fait que « l'un des éléments les plus importants de cet accord est l'unification de tous les enseignants dans un seul et même régime de base, dans le cadre de la fonction publique, garantissant à tous les mêmes droits et garanties, de l'emploi à la retraite. Les négociations se poursuivent actuellement pour la rédaction des dispositions du nouveau régime de base, que nous considérons comme une première étape pour redonner de la valeur aux enseignantes et enseignants et à l'école publique. »
Réforme globale du système éducatif
Firachine a ajouté qu’en parallèle du dialogue sur la profession et les conditions sociales des enseignant∙e∙s, le SNE-CDT est engagé dans un débat sur la réforme globale du système éducatif, « car nous considérons cela comme étant au cœur de nos missions ».
En effet, il a regretté que « l'éducation au Maroc connaît de grandes disparités en termes de qualité, de programmes et de méthodes pédagogiques, d'infrastructures et d'équipements, ce qui engendre de multiples manifestations d'inégalités sociales et communautaires. Ces inégalités dans l'éducation sont un défi majeur à surmonter, et, malgré les efforts déployés pour améliorer le système éducatif, il reste encore beaucoup à faire pour les réduire. »
Il a aussi souligné que « ce que nous avons fait et ce que nous faisons n'a été possible qu'en renforçant l'organisation syndicale, après le congrès national du syndicat nationale de l’enseignement, au cours de laquelle nous avons renouvelé le bureau national du syndicat de 66% et nous avons augmenté la représentation des femmes de 100%, ainsi que la représentation des jeunes ».
Le SNE-CDT a également formé une alliance avec les autres syndicats plus représentatifs du secteur pour coordonner les positions et négocier avec une vision commune sur les dossiers revendicatifs.
Il a aussi travaillé sur sa stratégie de communication pour impliquer les enseignant·e·s de tous bords en organisant des rencontres directes – plus de 50 - avec eux·elles dans toutes les villes marocaines.
Firachine a enfin expliqué que la stratégie de travail syndical repose sur quatre axes principaux :
- Le développement des compétences de leadership syndical et l'amélioration de la vision, de la force de proposition et des revendications concernant la politique éducative et les revendications des employé·e·s du secteur.
- L'établissement et le renforcement de l'organisation, l'élargissement de l'adhésion syndicale et la participation active des jeunes et des femmes à la vie syndicale.
- La promotion de la pratique médiatique et communicationnelle interne et externe, ainsi que l'utilisation organisée des meilleures pratiques des réseaux sociaux, des médias et de la communication.
- Le développement de relations de solidarité et de réseautage stratégique avec les associations de la société civile et les syndicats de l'éducation au niveau national et international.