Ei-iE

Les recommandations du Groupe de haut niveau, une feuille de route pour la lutte syndicale

Publié 1 août 2024 Mis à jour 5 septembre 2024

Les syndicats de l’éducation unissent leurs forces pour faire face à la pénurie mondiale d’enseignant·e·s et à ses causes, qui incluent les bas salaires, la surcharge de travail et la détérioration des conditions de travail.

Le 30 juillet, à l’occasion du 10e Congrès mondial de l’Internationale de l’Éducation à Buenos Aires, en Argentine, les délégué·e·s des syndicats de l’éducation de tous les continents se sont réuni·e·s dans le cadre d’une session thématique afin de relever ce défi mondial.

Cette session qui s’inscrivait dans le cadre de la campagne de l’IE « La force du public : Ensemble on fait école ! » portait plus spécifiquement sur la manière dont les recommandations du Groupe de haut niveau des Nations Unies sur la profession enseignante peuvent être utilisées par les syndicats de l’éducation afin de soutenir leurs principales revendications. Il s’agit notamment d’attirer et de maintenir en poste des enseignant.e.s qualifié.e.s en leur offrant des salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail.

En ouverture de la session, Angelo Gavrielatos, directeur de la campagne « La force du public : Ensemble on fait école ! », a souligné l’importance des recommandations en tant que feuille de route pour la lutte syndicale. « La clé pour remédier à la pénurie mondiale d’enseignant·e·s, estimée à quelque 44 millions, est de faire en sorte de maintenir en poste et d’embaucher les enseignant·e·s dont nous avons besoin », a déclaré M. Gavrielatos. « Les recommandations du Groupe de haut niveau constituent la base pour y parvenir. Organisons-nous et mobilisons-nous afin qu’elles soient mises en œuvre dans tous les pays. Investissons dans la profession enseignante, investissons dans l’éducation publique. La force du public : ensemble on fait école ! »

Mise en pratique des recommandations du Groupe de haut niveau

Modéré par Rebeca Logan, directrice de l’IE chargée des campagnes et de la communication, un panel de dirigeantes syndicales de tous les continents a débattu des recommandations les plus pertinentes dans leur contexte national, ainsi que des mesures prises pour les mettre en œuvre et des étapes à franchir au cours de la prochaine phase.

Le panel se composait de Manal Hdaife de la Public Primary School Teachers’ League (PPSTL), Sonia Alesso de la Confederación de Trabajadores de la Educación de la Republica Argentina (CTERA), Unifa Rosyidi de la Persekutuan Guru Republic (Indonésie) et Agnes Beatrice Bikoko de la Fédération camerounaise des syndicats de l’éducation (FECASE).

Mme Hdaife a insisté sur la nécessité de promouvoir des politiques visant à accroître le financement public de l’éducation et l’investissement dans la profession enseignante. « Il n’est pas possible d’assurer une éducation publique de qualité en l’absence d’un financement adéquat nous permettant de disposer d’enseignant·e·s dûment qualifié.e.s. »

La représentante du PPSTL a expliqué que le syndicat organisait des ateliers de travail dans chaque région « afin de porter les recommandations à la connaissance du plus grand nombre possible d’enseignant·e·s ». Le cycle d’ateliers organisé dans la région culminera par une table ronde réunissant l’ensemble des parties prenantes, afin d’inciter les gouvernements à les mettre en œuvre et à sensibiliser l’opinion publique à leur sujet.

À propos des recommandations, Sonia Alesso a souligné qu’il s’agissait d’un « document capital » qui appelle toutes les organisations membres de l’Internationale de l’Éducation à s’atteler à la tâche, à la fois « en l’examinant et en le diffusant à la base ». Mme Alesso a souligné qu’il était important d’œuvrer en faveur d’un financement accru de l’éducation publique par l’État. Elle a attiré l’attention sur les recommandations concernant l’investissement public dans la profession enseignante, le développement durable, la paix et la démocratie et la transformation de l’éducation sur la base d’un nouveau contrat social.

« Les gouvernements de droite cherchent à faire régresser l’éducation et à annuler la liberté académique, ils veulent s’ingérer dans nos décisions et nous avons besoin d’un nouveau contrat social qui place les droits des travailleurs et les droits humains au premier plan », a-t-elle déclaré.

Mettre fin à la précarité et promouvoir la justice de genre

Faisant référence au contexte indonésien, Mme Rosyidi a attiré l’attention sur les recommandations portant plus spécifiquement sur la nécessité d’assurer la stabilité de l’emploi pour le personnel de l’éducation. « Nous voulons mettre fin à l’emploi précaire et nous voulons que les enseignant.e.s contractuel·le·s passent au statut permanent », a-t-elle indiqué.

Mme Rosyidi a en outre insisté sur la nécessité de poursuivre la lutte en faveur de l’égalité des genres, une question qui est incluse dans les recommandations. « Il faut que les enseignantes soient des leaders et nous devons demander au gouvernement de mettre en place des procédures favorisant le leadership des femmes », a-t-elle déclaré.

La dirigeante du PGRI a précisé qu’une rencontre était prévue entre son syndicat et le ministre des Finances afin de discuter de la mise en œuvre des recommandations.

Le financement : une question de vie ou de mort

Mme Bikoko a évoqué le contexte complexe du Cameroun, insistant en particulier sur les recommandations relatives au financement, aux salaires, à la formation de qualité et accessible et à la garantie du développement professionnel.

Le financement « est une question de vie ou de mort (...) parce que les familles les plus vulnérables ne peuvent pas inscrire leurs enfants dans les écoles publiques, insuffisantes, alors que le secteur privé se livre à une ségrégation en faveur des élèves des classes privilégiées. » Par ailleurs, poursuit-elle, « les écoles et les universités doivent également disposer d’un financement adéquat en matière d’éducation afin de leur permettre d’investir dans des enseignant·e·s de qualité ».

Mme Bikoko a plaidé en faveur de la protection et du renforcement de la dignité de la profession enseignante dans ses relations avec les étudiant·e·s. « Sans un investissement de l’État, l’enseignement public est à l’agonie. L’éducation est un droit, pas un privilège », a-t-elle conclu.

La session s’est terminée par une discussion en plénière qui a souligné l’engagement collectif des affiliés de l’Internationale de l’Éducation à forger, par le biais d’une stratégie politico-organisationnelle commune, une profession enseignante bien rémunérée et respectée, avec une stabilité d’emploi garantie.