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Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste : « Lorsque l’Histoire se rappelle à nous avec tant d’insistance, nous devons prendre position »

Publié 27 janvier 2025 Mis à jour 30 janvier 2025

Le 27 janvier 2025, Journée dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, des éducateur·trice·s et des dirigeant·e·s syndicaux·ales de plus de 20 pays se sont réuni·e·s à Cracovie afin de commémorer le 80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau.

Organisé sous les auspices du syndicat polonais Zwiazek Nauczycielstwa Polskiego (ZNP), avec le concours du syndicat Gewerkschaft Erziehung und Wissenschaft (GEW), de l’association Verband Bildung und Erziehung (VBE) ainsi que du syndicat Israel Teachers’ Union (ITU), et le soutien de la Fondation Friedrich Ebert et du ministère polonais de l’Éducation, l’événement a rendu hommage aux victimes de l’Holocauste et souligné le rôle crucial de l’éducation dans la lutte contre l’antisémitisme, le racisme et la résurgence des idéologies d’extrême droite.

CSEE : l’éducation reste l’arme la plus puissante contre la haine et l’ignorance

« Cette conférence honore la mémoire des six millions de personnes qui ont perdu la vie pendant l’Holocauste. Libéré le 27 janvier 1945, le camps d’Auschwitz-Birkenau est devenu un rappel éternel de la capacité de cruauté et de résilience de l’humanité. Sur au moins 1,3 million de personnes emprisonnées dans ce complexe, 1,1 million – parmi lesquelles des Juifs, des Polonais, des Roms, des Russes et des prisonniers d’autres nationalités – ont été assassinées sous le régime nazi », a déclaré le président du Comité syndical européen de l’éducation (CSEE), John Mac Gabhann.

« Accueillie par le syndicat des enseignants et enseignantes de Pologne, le ZNP, cette conférence sur l’éducation représente le plus récent jalon d’un partenariat de longue date entre les syndicats de l’éducation d’Allemagne, d’Israël et de Pologne. Depuis une quarantaine d’années, les membres de ces syndicats se réunissent régulièrement pour explorer des stratégies efficaces de lutte contre l’antisémitisme, le racisme et la xénophobie, tout en encourageant la coexistence pacifique », a-t-il expliqué.

Et d’ajouter : « Les événements et les développements politiques survenus récemment en Europe et au-delà démontrent que l’extrême droite reste une menace grave et persistante. Les crimes haineux, les attaques antisémites, les crimes contre les personnes LGBTQI, ainsi que les actes de racisme et de discrimination demeurent des fléaux pour nos sociétés. La propagation de la désinformation et des fausses nouvelles, destinées à semer la haine et la division, nous oblige à renouveler notre engagement et à redoubler de détermination afin d’affronter ces questions en faisant montre de courage, d’empathie et d’une volonté inébranlable. »

John Mac Gabhann a également noté qu’« à une époque où les attaques contre les valeurs démocratiques fondamentales et les droits humains ont pris des proportions alarmantes, l’engagement indéfectible des dirigeants syndicaux et des militants de l’éducation est une source de motivation. Leur vigilance et leur attachement à s’opposer à la résurgence des idéologies fascistes offrent une lueur d’espoir en ces temps inquiétants. »

« Les résolutions adoptées lors du dernier Congrès mondial de l’Internationale de l’Éducation (IE) à Buenos Aires nous incitent vivement à développer des stratégies et à forger des alliances pour contrecarrer la croissance de l’extrême droite et ses attaques contre la démocratie et les droits des travailleurs et travailleuses. Les résolutions reconnaissent clairement que le fascisme menace le présent tout comme il a entaché le proche passé. Lorsque l’histoire se rappelle à nous avec tant d’insistance, l’heure n’est pas à la complaisance », a également déclaré Mac Gabhann.

« L’histoire telle que nous l’enseignons à nos élèves et, surtout, à nos propres enfants et communautés, doit être inspirée par un profond sens d’humanité, un respect profond et authentique pour les personnes assassinées dans les camps de la mort et une profonde gratitude envers celles qui, depuis leur libération, ont apporté leur témoignage au fil des décennies. »

Il a également insisté sur le fait que, « en tant qu’éducateurs et éducatrices et syndicalistes, nous assumons la responsabilité importante de modeler et d’inculquer aux générations futures, à nos enfants, à nos étudiants et étudiantes et à nos communautés, des valeurs de paix, de diversité et de compréhension. L’éducation reste notre arme la plus puissante contre la haine et l’ignorance. En encourageant la conscience historique, l’esprit critique et la réflexion éthique, nous donnons aux jeunes les moyens de rejeter les préjugés et de reconnaître l’égale dignité de l’humanité. Ce travail ne doit pas se limiter aux journées de commémoration ; il doit s’inscrire dans la pratique scolaire mais aussi communautaire, et transcender les frontières. »

L’éducation doit prendre position et s’opposer à l’antisémitisme résurgent

La présidente du GEW et membre du Bureau exécutif de l’IE, Maike Finnern, a déclaré : « La stigmatisation, les insultes, les menaces et la violence font partie du quotidien pour un grand nombre d’enseignants et enseignantes et d’étudiants et étudiantes de confession juive. L’antisémitisme n’a pas sa place dans les établissements d’enseignement. Les écoles, les universités, les garderies et les établissements de formation continue sont des lieux de diversité, de dialogue et d’éveil. Ils ont pour responsabilité particulière de transmettre les valeurs démocratiques aux jeunes et de leur permettre de lutter activement contre les préjugés, la haine et la discrimination. »

Outre les actions éducatives préventives, elle a insisté sur la nécessité de stratégies d’intervention claires : « Les établissements d’enseignement doivent mener une politique de tolérance zéro à l’égard de l’antisémitisme. Ils doivent pour cela mettre en place des séries de mesures contraignantes ainsi qu’un soutien aux personnes concernées. La protection contre la discrimination dans les établissements d’enseignement doit être étendue de manière systématique. »

Gerhard Brand, président fédéral de la VBE, a également expliqué que « dans les écoles, nous avons besoin de toute urgence de l’espace nécessaire pour pouvoir aborder de manière appropriée un sujet aussi important pour notre démocratie que l’antisémitisme et la lutte contre ce phénomène. Au lieu de cela, les classes sont surchargées, des cours sont annulés et les installations sont délabrées. Dans pareilles conditions, ni la prévention et l’éveil, ni l’éducation en général ne peuvent porter leurs fruits. »

Il a appelé à mieux accompagner les enseignant·e·s afin d’aborder le sujet de l’antisémitisme : « L’employeur doit mettre en place des mesures de formation classique et continue plus nombreuses et de meilleure qualité afin de former les enseignants et enseignantes de manière adéquate. En outre, nous devons pouvoir nous appuyer sur des équipes multidisciplinaires pour contrer la montée de l’antisémitisme avec la force nécessaire. Les responsables doivent enfin comprendre que l’avenir de notre démocratie et la liberté de l’individu dépendent de notre capacité à inverser les tendances négatives de ces dernières années. »

Dans la matinée du 28 janvier, les représentant·e·s syndicaux·ales visiteront le musée d’Auschwitz, rendront hommage aux victimes et déposeront des bougies et des gerbes au mémorial de Birkenau. L’après-midi, il·elle·s partageront leurs expériences au travers d’activités éducatives autour d’objets liés à l’Holocauste et à Auschwitz.

Politique de l’Internationale de l’Éducation et travail continu pour la démocratie et contre l’autoritarisme

Grâce aux nombreuses résolutions adoptées lors des différents Congrès mondiaux et aux diverses activités menées depuis sa création, l’IE affiche clairement sa volonté de protéger la démocratie et de lutter contre les mouvements d’extrême droite et l’autoritarisme aux quatre coins du monde. Également, elle n’a de cesse de mettre en lumière les contributions que les enseignant·e·s, les écoles, les universités et les organisations représentatives peuvent apporter pour consolider et faire avancer la vie démocratique.

À l’occasion de son 25e anniversaire, l’IE a publié « Éducation & Démocratie : 25 leçons de la profession enseignante », un document rédigé par son ancienne présidente Susan Hopgood et par son secrétaire général émérite Fred van Leeuwen. Ces leçons établissent une série de recommandations destinées à l’ensemble des enseignant·e·s travaillant à tous les niveaux de nos systèmes éducatifs et de leurs syndicats d’enseignement et sont une invitation à prendre position en faveur de la démocratie, en tous points du globe.