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Photo by Andy Feliciotti on Unsplash
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États-Unis : L’administration Trump coupe dans les effectifs du Département de l’Éducation, poursuivant ses attaques à l’encontre de l’enseignement public, de son corps enseignant et de ses élèves

Publié 18 mars 2025 Mis à jour 19 mars 2025

L’administration Trump, qui s’acharne sur le droit à l’éducation aux États-Unis, a décrété une série de suppressions d’emplois au sein du Département de l’Éducation, mettant à la porte près de la moitié des effectifs de l’agence. Ces licenciements font partie du programme de l’administration Trump qui vise à vider de sa substance ce département et, à terme, à le démanteler. Entre autres missions, cette agence veille à l’application de la législation anti-discrimination et alloue des financements pour soutenir les élèves défavorisé·e·s à travers le pays.

« En renvoyant sans raison près de la moitié du personnel du Département de l’Éducation, l’administration Trump élimine les fonctionnaires dévoués qui veillent à assurer l’accès des étudiants et étudiantes de notre pays aux programmes et ressources nécessaires, à limiter la taille des classes et à élargir les opportunités d’apprentissage. Personne ne peut raisonnablement croire qu’après le licenciement de près de la moitié du personnel, il sera encore possible de répondre aux demandes des élèves aux États-Unis », a déclaré Becky Pringle, présidente de la National Education Association (Association nationale de l’Éducation – NEA) et vice-présidente de l’Internationale de l’Éducation (IE).

La Présidente de l’ American Federation of Teachers (Fédération américaine des enseignant·e·s – AFT) Randi Weingarten a insisté, elle, que ces départs forcés « rendaient plus compliquées, voire impossibles, la protection de nos enfants et la mise à disposition des ressources qui leur sont indispensables pour réussir ». Dans un article d’opinion sur MSNBC, Mme Weingarten a averti qu’un « département éventré se traduisait en une diminution des personnels enseignants, en une augmentation du nombre d’élèves dans les classes et en une hausse des problèmes mentaux et comportementaux chez les élèves. Il est fort probable que nous voyions augmenter l’absentéisme et diminuer les taux d’obtention de diplôme. » La majeure partie du budget annuel du département étant allouée sous la forme de crédits étudiants aux Américain·e·s qui éprouvent des difficultés à poursuivre des études supérieures, le démantèlement de l’agence « accentuera encore les difficultés qu’éprouvent les familles à bas et moyens revenus pour payer les frais d’inscription à l’université et dans l’enseignement supérieur, lesquels montent en flèches », a ajouté la dirigeante du syndicat.

La secrétaire à l’Éducation Linda McMahon a déclaré que les licenciements étaient une première étape vers la fermeture totale de l’agence demandée par le Président Trump.

Le Département de l’Éducation est l’un des plus petits départements de l’exécutif fédéral. Il compte environ 3.000 membres du personnel dans son siège social à Washington et approximativement un millier d’autres dans 10 bureaux régionaux. Sa part dans le budget fédéral atteint à peine 4 %.

Selon les défenseur·euse·s du département, le démanteler priverait de services essentiels 26 millions d’élèves en situation de pauvreté et éliminerait l’aide à l’enseignement spécialisé sur laquelle s’appuient 7,5 millions d’élèves atteint·e·s d’un handicap. De plus, 12 millions d’étudiant·e·s se verraient dépourvu·e·s de services d’orientation professionnelle et d’un enseignement technique, ce qui menacerait leurs perspectives d’emploi. Une réduction des prêts étudiants pourrait fermer la porte de l’enseignement supérieur à d’autres 10 millions d’Américain·e·s issus de la classe moyenne.

En outre, l’administration Trump a mis fin à deux programmes qui fournissaient aux écoles publiques et aux banques alimentaires plus d’un milliard de dollars pour l’achat de nourriture auprès de fermiers locaux. Dans un contexte de hausse des prix des aliments, la fin de ces programmes aura des répercussions sur des millions d’élèves et de familles à l’échelle du pays.

Aux quatre coins des États-Unis, les syndicats de l’éducation et leurs communautés unissent leurs forces pour organiser, le 19 mars, des rassemblements scolaires nationaux « walk-in », afin d’exiger la protection des écoles publiques. À cette occasion, les parents, les éducateur·trice·s, les étudiant·e·s, mais aussi le voisinage et les dirigeant·e·s de ces communautés se réuniront devant les écoles 30 à 45 minutes avant le début des cours. Les communautés scolaires mobilisées écouteront des intervenant·e·s exposer leurs demandes pour les établissements scolaires. Ensuite, tous et toutes entreront ensemble dans l’école, en signe d’unité et de soutien envers les programmes indispensables à l’épanouissement des collectivités locales.

Une solidarité mondiale à l’appui des personnels éducatifs américains

La NEA et l’AFT, toutes deux membres de l’Internationale de l’Éducation, ont uni leurs forces pour s’opposer au programme de M. Trump visant à affaiblir l’enseignement public.

Les syndicats ont reçu une avalanche de marques de solidarités offertes par des collègues du monde entier.

« L’administration Trump et les milliardaires qui l’appuient cherchent à démolir le progrès, à transformer l’éducation en un privilège et à favoriser la propagande aux dépens de la vérité. Leur vision inclut la soumission des femmes, le déni des droits LGBTI+, l’exploitation des travailleurs et travailleuses, la pérennisation d’un racisme non réprimé et le contrôle des démocraties par le pouvoir financier et militaire », a expliqué Mugwena Maluleke, président de l’IE.

Il a assuré que « nos collègues aux États-Unis adoptent une position ferme face à ces attaques. Et ils ne sont pas seuls. Dans le monde entier, les éducateurs et éducatrices se tiennent à leurs côtés. En tant que mouvement syndical mondial de l’éducation, notre force réside dans la solidarité et dans la résistance. Ensemble, nous détenons le pouvoir de défier les injustices, de nous battre pour défendre les droits des personnels de l’éducation et des élèves, et de rebâtir un enseignement public qui soit le fondement de la paix, du progrès et de l’équité. »

Les membres du Comité permanent de l’enseignement supérieur et de la recherche du Comité syndical européen de l’éducation (CSEE), l’instance régionale de l’IE pour l’Europe, ont également exprimé leur solidarité.

Le comité s’est réuni à Bruxelles les 12 et 13 mars et a adopté une déclaration de soutien aux élèves et aux collègues des États-Unis, insistant que « cette attaque abusive contre l’enseignement public se manifeste de façon dramatique par l’intention déclarée de fermer de Département fédéral de l’Éducation, par des réductions révoltantes et sans précédent des financements vitaux pour l’enseignement public et les programmes de recherche, par l’assaut mené contre la liberté académique et par l’imposition associée d’une obéissance par anticipation et d’une autocensure des établissements d’enseignement et des institutions de recherche.

Ces mesures menacent les fondations mêmes de la société démocratique. Nous nous opposons fermement à toute tentative de museler la liberté académique et exhortons l’administration étasunienne à respecter les principes garantissant l’intégrité et l’indépendance des établissements d’enseignement et des institutions de recherche. »