En Jamaïque, lancement de la campagne « La force du public : ensemble, on fait école ! » sur fond de pénurie critique d’enseignant·e·s
Dans un effort visant à remédier à la pénurie critique qui touche leur profession et à améliorer la situation de l’éducation à l’échelle nationale, l’Association des enseignant·e·s jamaïcain·e·s (Jamaica Teachers’ Association, JTA) a lancé la campagne La force du public : ensemble, on fait école !. Cette initiative cherche à résoudre la pénurie d’enseignant·e·s en améliorant les infrastructures éducatives et les rémunérations.
Le système éducatif jamaïcain : appel à l’action
La Jamaïque doit relever l’immense défi qui pèse sur son secteur éducatif, ce dernier étant confronté à une pénurie d’enseignant·e·s, elle-même exacerbée par l’émigration vers des pays tels que les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni. Le lancement de la campagne La force du public : ensemble, on fait école ! marque un tournant décisif dans la résolution de ces problèmes. Menée par l’Internationale de l’Éducation (IE), cette campagne mondiale cherche à responsabiliser les gouvernements et à susciter l’adoption de politiques destinées à attirer et à retenir les enseignant·e·s dans la profession.

La triste réalité de cette pénurie
Le 21 mars, à l’occasion de l’inauguration de la campagne, le président de la JTA, Mark Smith, a souligné l’état désastreux de la situation et a cité les estimations de l’UNESCO chiffrant la pénurie mondiale à 44 millions de postes d’ici la fin de la décennie. Il existe une fuite des cerveaux en Jamaïque dans la profession enseignante : en un an, plus de 700 enseignant·e·s se sont établi·e·s aux États-Unis et 500 au Royaume-Uni. Bien que la Jamaïque dispose d’une dizaine d’institutions de formation pédagogique, elle peine à former un public assez large pour satisfaire la demande.

« Nous devons veiller à ne pas instituer un modèle éducatif qui voit les enseignants et enseignantes quitter la profession après un ou deux ans de pratique. Cette tendance ébranle la qualité de l’enseignement que nous pouvons fournir à nos enfants. Et un pays qui n’estime pas les enseignants et enseignantes à leur juste valeur n’attache aucune importance à son avenir, parce que les enfants sont cet avenir », a-t-il ajouté.
Investir dans l’éducation : un impératif stratégique
M. Smith a ensuite insisté sur la nécessité de procéder à des investissements stratégiques dans l’éducation, y compris dans la rémunération des enseignant·e·s, dans les infrastructures et dans l’accès de tous et toutes à une éducation de qualité. Il a interpellé le gouvernement et les responsables politiques du pays afin qu’ils placent l’éducation au-devant de leurs priorités, d’autant plus que se tiendront bientôt des élections législatives.
Une solidarité et un soutien mondiaux
Des partenaires internationaux venus du Royaume-Uni, des États-Unis et du Canada ont assisté au lancement de la campagne. Ils ont partagé leurs perspectives sur la pénurie professorale et ont exprimé leur solidarité à l’égard de la Jamaïque. Des représentants du Syndicat national de l’éducation (National Education Union, NEU) du Royaume-Uni, de la National Education Association (Association nationale de l’éducation, NEA) des États-Unis et de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants (FCE) ont souligné la nécessité d’une coopération mondiale pour s’attaquer à la pénurie, remarquant la complexité de la tâche lorsque tant d’enseignant·e·s quittent un pays tel que la Jamaïque pour le Royaume-Uni ou l’Amérique du Nord.
Un cadre pour le changement
Angelo Gavrielatos, responsable de la campagne La force du public, a présenté les recommandations des Nations Unies sur la profession enseignante, qui dressent un cadre pour attirer et retenir les enseignant·e·s. Ces recommandations promeuvent un salaire compétitif, une charge de travail acceptable et la sécurité de l’emploi comme des facteurs clés pour remédier à la situation.

Paroles d’enseignant·e·s
Au cours de l’événement, plusieurs dirigeant·e·s de la JTA ont exprimé leur satisfaction de pouvoir se joindre à cette campagne mondiale.
Pour Mark Nicely, secrétaire général de la JTA, « le plus grand avantage de La force du public : ensemble, on fait école ! est son potentiel unificateur capable de rassembler les éducateurs et éducatrices et travailleurs et travailleuses de l’éducation du monde entier, et de créer un mouvement de mobilisation universel chargé de plaider auprès des gouvernements pour que l’éducation devienne une priorité et que progressent le bien-être et la durabilité de l’humanité. »
Joan Blackwood-Simpson, membre du Comité des relations internationales de la JTA, a expliqué que « la campagne La force du public : ensemble, on fait école ! est une formidable initiative pour nous, en tant qu’éducateurs et éducatrices, car elle contribuera à propager les appels lancés par le secteur depuis des décennies, dans un contexte où le manque de financement de l’éducation est ignoré depuis de nombreuses années. Cet appel à l’action galvanisera le soutien apporté par l’ensemble des membres au travers d’un engagement plus actif. »
Selon Anniana Jones, présidente du Comité pour le développement professionnel et le bien-être des enseignant·e·s de la JTA, « la campagne La force du public : ensemble on fait école ! change radicalement la donne pour les enseignants et enseignantes de Jamaïque, en particulier ceux et celles d’entre nous à l’œuvre dans les établissements scolaires qui souffrent le plus de la situation. Un financement accru signifie de meilleurs salaires, des classes plus sûres, des ressources adéquates et un réel soutien pour mener à bien les enseignements. Nous devons rester solidaires, élever ensemble nos voix et exiger que nos gouvernements investissent dans l’éducation. Parce que quand les enseignants et enseignantes gagnent, les élèves gagnent, et la Jamaïque aussi ! ».
Rum Lewis, président du Comité national du secondaire de la JTA, s’est fait l’écho de ses collègues, déclarant que « la campagne La force du public : ensemble, on fait école ! et les recommandations peuvent attirer l’attention sur la détresse des enseignants et enseignantes de Jamaïque et renforcer les efforts de sensibilisation de la JTA. Grâce à cette campagne, la JTA devrait plus facilement élaborer des stratégies visant à augmenter les salaires et à améliorer les conditions de travail dans l’enseignement. En outre, elle devrait freiner l’érosion du nombre d’enseignants et enseignantes en Jamaïque. »

L’avenir du système éducatif jamaïcain : ne pas laisser le hasard faire les choses
Dans une tribune publiée (en anglais) le 24 mars 2025 dans le quotidien jamaïcain The Gleaner et intitulée « L’avenir de l’éducation ne peut être laissé au hasard », Garth Anderson, doyen du collège des enseignant∙e∙s de la Jamaïque, ancien président de la JTA, et actuellement à la tête du Syndicat des enseignant∙e∙s caribéen∙ne∙s (Caribbean Union of Teachers – CUT), a écrit : « La Jamaïque se trouve à un moment décisif de son histoire, alors qu’elle s’engage dans les débats budgétaires annuels et s’attend à la tenue prochaine d’élections législatives. Cette période offre la chance, tant pour les décideurs et décideuses politiques que les citoyens et citoyennes, d’examiner les projets du gouvernement en matière de financement des services essentiels – et surtout de l’éducation. Il est impératif d’évaluer si des ressources adéquates sont allouées à l’éducation, à titre de bien public fondamental et de moteur du développement national. »
Et de conclure en déclarant que « l’avenir du système éducatif jamaïcain ne peut être laissé au hasard. Au contraire, une action collective est indispensable. Les responsables politiques doivent tenir leurs engagements de financement de l’éducation, tandis que les citoyens et citoyennes – parents, enseignants et enseignantes, élèves ou dirigeants et dirigeantes de la communauté – doivent activement participer aux efforts de sensibilisation. »

Portons notre regard sur l’avenir : une vision pour le futur
Tandis que la Jamaïque s’engage dans la campagne La force du public : ensemble, on fait école !, l’objectif reste de créer un système éducatif durable et de qualité. La campagne veille à s’assurer que chaque enfant puisse accéder à des enseignant·e·s qualifié·e·s et soutenu·e·s, ainsi qu’aux ressources nécessaires à la réussite scolaire. La JTA est prête à poursuivre sa lutte en vue de transformer le secteur éducatif jamaïcain et d’offrir un avenir plus brillant à la Jamaïque.