« La Finlande montre la voie », par David Edwards
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Les jeunes de ce monde, tout comme les moins jeunes, laissent parfois transparaître une impression de fatalité sans espoir, où le pessimisme est devenu la norme. L’inconvénient du pessimisme, c’est qu’il est par nature négatif. Il réduit à néant la capacité d’agir, de créer quelque chose de mieux dans l’intérêt des générations futures. Selon moi, l’éducation est l’antithèse du pessimisme. L’éducation est optimiste. Elle est absolument fondamentale à la créativité: ce n’est qu’au travers de l’éducation que des mesures peuvent être prises pour parvenir à un monde meilleur.
A la mi-mars, j’ai présidé une délégation de l’Internationale de l’Education à l’occasion du Sommet international sur la profession enseignante (ISTP). Et par nature, ce sommet est un événement empreint d’optimisme. Depuis neuf ans, l’événement réunit des ministres et des dirigeant·e·s de syndicats de l’enseignement afin d’élaborer les politiques qui permettront d’améliorer la confiance des enseignant·e·s en eux·elles-mêmes, une démarche qui aurait semblé très improbable avant la création de ce Sommet.
En un sens, la Finlande était le pays idéal pour accueillir cette neuvième édition. Dans un monde où le populisme négatif gagne du terrain, ce pays est l’endroit parfait pour concentrer sur lui toute l’attention mondiale et être le symbole de l’optimisme inhérent à notre profession.
Olli-Pekka Heinonen, le Directeur général de l’Agence nationale pour l’Education, a planté le décor. En Finlande, l’éducation est l’une des clés de voûte de la société. Elle est le fruit d’un partenariat entre les parents et les enseignant·e·s, aux côtés de leur syndicat, l’OAJ. Elle se fonde sur le principe de l’excellence par l’équité, pour tou·te·s. Rien dans l’éducation finlandaise ne conduit à des impasses. Le système éducatif repose sur la confiance, le but étant de permettre aux individus de donner du sens à leur vie, et donc d’acquérir les compétences nécessaires à cette fin. Pour y parvenir, la Finlande dispose d’un système holistique d’enseignement public.
Lors du Sommet, nous avons pris connaissance d’importantes contributions quant à la manière de parvenir à un leadership collaboratif à travers l’ensemble des systèmes d’éducation de même qu’à une éducation de qualité pour tou·te·s, dès les premières années de scolarisation. Par exemple, le ministre écossais John Swinney et le Directeur de l’EIS Larry Flanagan ont déclaré que les mesures essentielles concernaient l’investissement dans les chef·fe·s d’établissement et le développement de l’agentivité de l’enseignant·e.
La délégation espagnole a mis en avant l’existence de tendances contradictoires. La première concerne la pression en faveur d’une réglementation accrue et la seconde une culture florissante de l’innovation. Il convient d’y remédier. En matière d’éducation, l’objectif est de parvenir à un leadership collaboratif en travaillant avec les syndicats d’enseignants pour soutenir les écoles en tant qu’organismes d’apprentissage.
Le ministre suédois a mis en lumière la collaboration entretenue avec les syndicats d’enseignants dans le cadre de son programme national de perfectionnement professionnel et pour instaurer le leadership des enseignant·e·s en classe. La Présidente du Lärarförbundet, Johanna Jaara Åstrand, a également insisté sur le creusement des inégalités comme étant l’un des principaux problèmes à résoudre. Du fait du manque de ressources, il peut aussi être plus difficile pour l’enseignant·e de s’affirmer comme leader en classe.
Et pour la première fois depuis le lancement de ce Sommet, un dialogue important a été initié sur l’éducation de la petite enfance. Autour de la table, nous avons entendu parler de la grande disparité des salaires, des conditions de travail, des ressources et des qualifications des enseignant·e·s de l’EPE. Plaidant pour des éducateur·rice·s hautement qualifiés dans le secteur de la petite enfance, le Président de l’OAJ Olli Luukkainen s’est enquis de savoir pour quelle raison, en Finlande, les enseignant·e·s au niveau préscolaire n’étaient pas logés à la même enseigne que celles et ceux du primaire et du secondaire, qui sont titulaires d’une maîtrise. Les collègues danois·e·s se sont exprimés, y compris par le biais de l’intervention remarquée de Lasse Bjerg Jørgensen du BUPL, qui a déclaré que de grandes avancées étaient possibles si le dialogue servait de base à l’élaboration d’une stratégie que tous les acteurs auraient à cœur de mener à bien. Il a également souligné l’importance d’un personnel qualifié et de conditions de travail adéquates pour le personnel de l’EPE.
Selon moi, le plus important à retenir est la nécessité d’éviter la ségrégation pédagogique à laquelle nous assistons dans trop de pays. Les qualifications et l’apprentissage continu sont l’élément clé de ce processus. Contrairement à l’intensification du recours aux écrans pour les jeunes enfants. Il s’agit ici d’un débat fondamental qui sera repris et approfondi à l’occasion de la Conférence internationale sur l’approche nordique en matière de pédagogie, organisée par l’UEN, l’affilié norvégien de l’Internationale de l’Education, à la fin du mois de mars.
La dernière session a abordé les épineux problèmes rencontrés par les syndicats et les ministres. Cinq grandes catégories d’engagements ont ainsi été identifiées par les délégations nationales. Un certain nombre de pays ont mis l’accent sur l’amélioration de la formation initiale, du perfectionnement professionnel et du tutorat des enseignant·e·s. Une autre catégorie était axée sur la réforme des programmes, un pays ayant notamment plaidé pour l’inclusion de la question du développement durable dans les programmes de cours. La réforme de l’EPE a fait l’objet d’un vaste groupe d’engagements. Une autre série d’engagements s’est concentrée sur l’aide à apporter aux écoles pour répondre à la numérisation. Une des catégories d’engagements les plus importantes regroupait les conditions de travail des enseignant·e·s, leur statut, la direction d’établissement, l’offre et les moyens d’assurer l’attrait de cette profession.
L’ISTP en Finlande a mis en exergue le fait que l’éducation continuait de progresser et pouvait se projeter avec optimisme vers l’avenir. Les ministres et les syndicats peuvent à présent œuvrer à la résolution des problèmes épineux sur un pied d’égalité. Cet optimisme reflète les actions des jeunes contre le changement climatique.
Nous avons appris récemment que la jeune militante suédoise pour le climat Greta Thunberg avait été nommée pour le prix Nobel de la paix. Elle compte au nombre des 1,4 million d’élèves et étudiant·e·s ayant déjà pris part à l’action contre le changement climatique et contre les personnes qui en nient l’existence. Quelle n’a pas été ma fierté que l’IE témoigne son soutien à des étudiant·e·s manifestant à Bruxelles au moyen d’une bannière suspendue à l’extérieur de notre bâtiment, déclarant: « les enseignantes et enseignants du monde entier sont avec vous et fiers de vous ».
Comme l’a déclaré Angel Gurría, Secrétaire général de l’OCDE, lors du Sommet, nous autres personnels de l’éducation tenons l’avenir de l’humanité dans nos mains. C’est pourquoi il est important que nous construisions la confiance, l’engagement ainsi qu’une culture de collaboration au profit de notre profession, nos étudiant·e·s, nos sociétés et notre planète.
Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.