Beijing +25: "Transformer la promesse de Pékin en réalité pour les apprenant·e·s et travailleur·euse·s du secteur de l’éducation."
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Les exemples du travail réalisé par l’Internationale de l’Éducation (IE) et ses organisations membres dans différentes régions du monde depuis l’adoption du Programme d’Action de Beijing en 1995 montrent le pouvoir de l’action collective pour trouver des solutions collectives.
Le programme d’action de Beijing (PAB) a recensé douze « domaines critiques de préoccupation » et a mis en évidence des « objectifs stratégiques » pour chacun de ces domaines afin de faire progresser les droits des femmes et des filles. Le PAB a également décrit les mesures que doivent prendre les principales parties prenantes afin que ses dispositions soient mises en œuvre. En effet, lorsque les 189 gouvernements ont signé le Programme d’action de Beijing, ils se sont engagés à prendre eux-mêmes des mesures en tant que gouvernements et ont fait le serment que les principales parties prenantes, notamment les syndicats, prendraient également des mesures en vue de sa mise en œuvre.
Les contributions des syndicats de l’éducation – tant au niveau national qu’international – à la mise en œuvre du PAB peuvent être vues à la lumière des objectifs stratégiques dans divers domaines critiques de préoccupation identifiés dans le PAB, en particulier :
- Education et formation des femmes
- Les femmes et l’économie
- Les femmes et la prise de décisions
- La violence à l’égard des femmes
Les exemples du travail réalisé par les syndicats de l’éducation décrits ci-après montrent la différence essentielle que la négociation collective a faite pour l’avancement des droits des femmes.
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L’objectif stratégique B.3 du PAB concerne l’éducation et insiste entre autres, sur la nécessité d’offrir aux femmes un accès égal à tous les niveaux d’enseignement, d’éradiquer l’analphabétisme des femmes et d’améliorer l’accès des femmes à la formation professionnelle, à l’enseignement scientifique et technique et à l’éducation permanente (PAP, 1995, § 80-88). Le PAB reconnaît l’éducation comme un droit humain et un outil essentiel pour atteindre les objectifs d’égalité, de développement et de paix [1].
2012-2015 : L'IE et ses organisations membres ont plaidé intensément aux niveaux national, régional et mondial pour que les nouveaux Objectifs de développement durable (SDG) - qui auraient remplacé les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) - incluent un objectif spécifique sur l'éducation. Le SDG4 appelle les États membres de l'ONU à "assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ».
2018 : La Fédération nationale danoise des enseignant·e·s de la petite enfance et des éducateur·trice·s de la jeunesse (BUPL) renforce la reconnaissance de la profession d’éducateur·trice de la petite enfance, dont 90 % sont des femmes au Danemark.
Photo: BUPL
2019 : Après deux décennies de négociation et de travail avec le pouvoir législatif national, le Gambia Teachers’ Union réussit son pari de forcer le gouvernement à revoir le budget national de l’éducation, en obtenant une hausse de cent soixante millions de dalasi gambiens (environ trois millions de dollars américains) par an.
L'Association des enseignants de la Jamaïque (Jamaica Teachers’ Association) a obtenu une requalification de l'enseignement, ce qui a conduit à un alignement vis-à-vis de la fonction publique et du secteur privé.
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L’objectif stratégique F.5 du PAB concerne les femmes et l’économie et réclame notamment l’élimination de toutes les formes de discrimination dans l’emploi par : l’application de la Convention n° 100 de l’OIT concernant l’égalité de rémunération et les droits des travailleur·euse·s et le principe de salaire équivalent pour un travail de valeur égale ; l’interdiction légale de la discrimination fondée sur le sexe dans le monde du travail et dans l’emploi ; et la reconnaissance des droits de négociation collective en tant qu’outil essentiel d’amélioration des conditions de travail des femmes et d’élimination des écarts de salaires entre hommes et femmes (PAB, 1995, § 178).
1996: Au Gabon, le Syndicat de l'Education Nationale (SENA), a réussi à négocier l'intégration des enseignants auxiliaires dans la fonction publique.
1999 : Le Kenya National Union of Teachers mobilise ses membres et obtient le paiement d’une indemnité de conditions de vie difficiles pour les enseignant·e·s travaillant dans des zones géographiques où il·elle·s rencontrent des difficultés particulières. En 2005, le syndicat obtient une prime de mobilité pour tou·te·s les enseignant·e·s en fonction de leur niveau de salaire.
2002-2005 : L’Internationale de l’Éducation (IE) et l’Internationale des services publics (ISP) mènent des actions conjointes dans le cadre d’une campagne sur l’égalité salariale et l’IE lance la campagne « L’égalité salariale maintenant ! » en 2009 afin de renforcer les capacités des syndicats et de leurs membres, en particulier les femmes, à lutter pour l’égalité salariale. L’expérience syndicale montre que la négociation collective sur les niveaux de rémunération et sur le fonctionnement des barèmes salariaux peut vraiment faire la différence pour combler l’écart salarial.
L’égalité de rémunération des hommes et des femmes est un problème surveillé de près par les syndicats de l’éducation, notamment par Lararforbundet en Suède, après chaque révision annuelle des salaires des enseignant·e·s. Après chaque révision salariale, le syndicat lance une enquête pour recenser tous les cas de discrimination fondée sur le sexe ou dirigée contre les enseignant·e·s qui sont ou ont été en congé parental. Le syndicat a gagné des affaires concernant des membres qui ont été victimes de ces formes de discrimination.
Les syndicats suédois de l’éducation ont également réussi à contraindre les employeurs à présenter des statistiques salariales ventilées par sexe et par âge. Cela fournit des données irréfutables sur la base desquelles le syndicat peut élaborer un argumentaire solide dans des affaires d’inégalités salariales structurelles fondées sur le sexe.
2018: La West Virginia Education Association, un affilié de la National Education Association (États-Unis), obtient une hausse de salaire de 5 % pour les personnels enseignants et de soutien à l’éducation ainsi qu’une solution à long terme pour les revenus versés par l’assurance santé des salarié·e·s du secteur public après une grève de 9 jours, auquel plus de 35 000 membres ont participé.
2018 : L’Irish Federation of University Teachers (IFUT) gagne une action pour des affiliées victimes de discrimination fondée sur le sexe et l’âge dans un concours de promotion qui a eu lieu en 2008-2009. L’affaire est finalement réglée dans le cadre d’une négociation locale entre l’IFUT et l’employeur en 2018. D’autres salariées qui avaient été victimes de la même discrimination pendant le même concours ont engagé à grands frais et avec beaucoup de difficultés une action au civil. Elles ont finalement réglé l’affaire en dehors des tribunaux, après le succès de l’IFUT dans le cadre des relations industrielles ; chaque affiliée n’a supporté aucun frais de justice et a bénéficié du plein soutien du syndicat pendant toute la procédure.
Le Secondary School Teachers’ Union of Zambia (SESTUZ) et d’autres syndicats du secteur se sont mobilisés avec succès pour réclamer une réforme législative afin que l’âge de la retraite des hommes et des femmes soit le même.
2001: La Centrale des Syndicats du Québec (CSQ) commence à représenter un groupe de travailleur·euse·s d’éducation de la petite enfance (essentiellement des travailleuses indépendantes), qui voulaient faire reconnaître leur statut de salarié·e·s par le gouvernement. Après un recours devant la Cour suprême du Québec et une plainte devant l’Organisation internationale du travail, l’affaire a été remportée et les travailleur·euse·s ont pu négocier leur première convention collective près de dix ans plus tard.
2015: L’impact du relèvement de l’âge de la retraite légale pour les femmes nées dans les années 1950 provoque des difficultés supplémentaires et plonge de nombreuses femmes dans la pauvreté. Depuis 2010, le NASUWT, le syndicat britannique des enseignant·e·s, a fait campagne, organisé et mené des actions afin de protester contre l’inégalité des retraites qui touche les femmes de façon disproportionnée au Royaume-Uni, y compris les enseignantes. Au bout de 5 ans, le syndicat obtient que les femmes nées dans les années 1950 soient protégées contre le relèvement de l’âge de la retraite des enseignant·e·s et la suppression du régime de retraite des enseignant·e·s fondé sur le dernier salaire.
2008: Le gouvernement italien tente de réduire la fréquentation des écoles primaires à 24 heures par semaine, une mesure qui aurait contraint de nombreuses mères à renoncer à leur emploi et aurait provoqué des pertes d’emploi massives pour les enseignant·e·s et d’autres personnels de l’éducation. Après une grève lancée par les syndicats de l’éducation UIL-Scuola, FLC-CGIL et CISL-Scuola, qui a recueilli un soutien considérable auprès du public, la mesure est retirée.
Dans le cadre d'une campagne continue de cinq ans - "JA 13 : Parce que les enseignants du primaire le méritent" - la Gewerkschaft Erziehung und Wissenschaft (GEW) a fortement fait pression et plaidé pour que les enseignants du primaire (dont la grande majorité sont des femmes en Allemagne) reçoivent le même niveau de salaire que les enseignants du secondaire. Ce but a été atteint dans un certain nombre d'États, et des négociations sont en cours dans d'autres. Le syndicat a également lutté avec succès pour que les enseignants du primaire reçoivent une formation de même durée que celle de leurs collègues du secondaire, reconnaissant ainsi que la profession est tout aussi complexe dans les deux secteurs, ce qui constitue une condition préalable importante pour l'égalité de statut professionnel et de salaire.
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L’objectif stratégique F.6 du PAB vise, notamment, la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles des femmes et des hommespar l’adoption de mesures permettant aux femmes de prendre des congés temporaires, de bénéficier d’indemnités d’emploi et de retraite transférables et de créer des systèmes permettant de modifier les horaires de travail sans sacrifier leurs perspectives d’avancement professionnel et de carrière, l’élaboration de programmes éducatifs, de campagnes dans les médias et de programmes d’éducation dans les écoles et les collectivités en vue de sensibiliser à l’égalité entre les sexes et de donner une image non stéréotypée des rôles des hommes et des femmes dans la famille (PAB, 1995, § 180).
2002: La Graduate Employees Organization de l’Université du Michigan, un affilié de l’American Federation of Teachers (AFT), obtient le financement de la toute première allocation de garde d’enfants pour les employé·e·s d’une université américaine dans le cadre d’une convention collective.
2015: La Federación Nacional de Docentes Universitarios (CONADU) – Fédération nationale des professeur·e·s d’université d’Argentine - obtient l’inclusion dans la convention collective nationale des professeur·e·s d’université d’une clause de congé spécial pour la naissance ou l’adoption d’un enfant (Licencias por Nacimiento o Adopcion), à savoir 180 jours à répartir entre les deux parents, indépendamment de leur identité de genre ou du fait qu’il s’agisse d’une relation entre personnes du même sexe.
En Norvège, l’Union of Education (UEN) a participé à l’obtention de nombreuses victoires importantes en matière de congé parental ces vingt dernières années. En 1999, les pères avaient droit à un congé parental de six semaines après la naissance d’un enfant. Aujourd’hui, le congé parental est réparti entre les parents en trois parts égales et les parents sont libres de décider si la troisième part est prise par la mère ou par le père. Les parents sont tenus de prendre la troisième part qui leur est accordée ou risquent de la perdre. Bien que cette approche ait été accueillie par de fortes critiques, les autorités norvégiennes ont jugé que c’était la meilleure solution pour permettre aux femmes de conserver leurs droits à pension et à une promotion au travail, car elles ne sont pas forcées de rester éloignées du marché du travail parce qu’elles seules – et pas les pères – pouvaient prendre un congé parental plus long.
Le syndicat des enseignants du Botswana (Botswana Teachers Union - BTU) a négocié pour que les femmes reçoivent le plein salaire pendant leur congé de maternité, et la loi nationale sur l'emploi (amendement) de 2010, qui établissait un salaire minimum de la moitié du salaire pour les femmes en congé de maternité a été modifiée en conséquence.
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– Diriger par l’exemple –
L'objectif stratégique D.1 du programme d'action de Pékin porte sur la violence à l'égard des femmes et invite les gouvernements, les employeurs, les syndicats, les organisations communautaires et de jeunesse et les organisations non gouvernementales à agir et prendre des mesures intégrées pour prévenir et éliminer la violence à l'égard des femmes. Cela comprend "des programmes et des procédures visant à éliminer le harcèlement sexuel et les autres formes de violence à l'égard des femmes dans tous les établissements d'enseignement, sur les lieux de travail et ailleurs".
2016-2019: Dans le cadre d'une collaboration entre l'IE et l'Initiative des Nations Unies pour l'éducation des filles (UNGEI), le programme « Teachers Take Action to End School-related Gender-based Violence (SRGBV) » (Les enseignants agissent pour mettre fin à la violence sexiste en milieu scolaire) comprenait neuf organisations membres de l'IE dans sept pays d'Afrique subsaharienne. Le programme a adopté une approche participative, ce qui a permis aux membres, aux responsables et aux dirigeants des syndicats d'approfondir leur compréhension de la nature de l'inégalité des sexes et de la violence sexiste dans leur contexte.
2019 : Le 8ème Congrès mondial de l'IE a adopté une résolution sur "l'élimination de toutes les formes harcèlement et de violence sexuels dans les syndicats d'enseignants".
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L’objectif stratégique G.1 du PAB concerne les femmes et la prise de décisions et requiert l’adoption de mesures propres à assurer aux femmes l’égalité d’accès et la pleine participation aux structures du pouvoir et à la prise de décisions, y compris dans les syndicats, notamment grâce aux mesures suivantes : agir pour créer une masse critique de femmes dirigeantes aux postes stratégiques de prise de décisions ; faire en sorte que les critères de recrutement et de nomination aux organes consultatifs et de décision n’entraînent pas de discrimination à l’égard des femmes ; encourager les syndicats à s’efforcer de réaliser dans leurs rangs l’égalité entre femmes et hommes, y compris l’égalité de participation dans leurs organes de décision et dans les négociations dans tous les domaines et à tous les niveaux (PAB, 1995, § 190 et 192).
Comme l’y obligent les dispositions de ses Statuts et depuis sa création en 1993, l’IE a créé des espaces et des opportunités pour la participation, la représentation et le leadership de femmes à tous les niveaux de ses structures internes.
La représentation des femmes au sein des structures de décision et de direction de l’IE n’a cessé d’augmenter au cours des 25 dernières années. Actuellement, le Bureau Exécutif de l’IE est le premier dans l’histoire de l’organisation où les femmes sont largement majoritaires : 15 femmes pour 12 hommes. Ce résultat est lié à une modification des Statuts de l’IE, adoptée par le 8e Congrès mondial (juillet 2019), qui a introduit un système de quotas exigeant qu’au moins la moitié des sièges ouverts au sein du Bureau exécutif soient occupés par des femmes.
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Bien qu’il y ait beaucoup à célébrer en ce qui concerne les contributions apportées par les syndicats de l’éducation à la mise en œuvre du Programme d’action de Beijing au cours des vingt-cinq dernières années, il reste encore du chemin à faire.
L’IE et ses organisations membres du monde entier sont déterminées à aller jusqu’au bout, parce que la lutte pour l’égalité des sexes est un marathon et que les syndicats de l’éducation sont confiants dans leur capacités à être à la hauteur de la tâche.
"Tant que nous ne veillerons pas à ce que les femmes adhèrent à nos syndicats en proportion de leur emploi, tant que les femmes ne participeront pas à nos syndicats à tous les niveaux - de la base jusqu'aux organes de gouvernance ou de direction - nous ne pourrons pas avoir une organisation qui atteindra nos buts et objectifs. Il ne s'agit donc pas seulement de savoir si les femmes sont là, les femmes doivent être là si nous voulons être le type d'organisation que nous devons et voulons être pour garantir que nous atteignons tous nos objectifs".
(Présidente de l'IE, Susan Hopgood)
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2020 marque le 25e anniversaire de l'adoption de la Déclaration et de la Plate-forme d'action de Pékin (PAP) lors de la 4e Conférence mondiale des Nations unies sur les femmes qui s'est tenue à Pékin en 1995. La PAP reste le plan le plus progressiste pour la réalisation des droits des femmes jamais approuvé par les gouvernements au niveau mondial. Pour commémorer cette étape importante, voici le premier d'une série spéciale de blogs de l'IE « Beijing +25 » sur le portail Mondes de l'Education; le dernier blog de la série sera publié à l'occasion de la Journée internationale des droits de l'homme (10 décembre 2020). Retrouvez l'ensemble des blogs de la série ici.
[1] Paragraphe 69 du PAB.
Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.