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Suisse : les syndicats de l’éducation vent debout contre la réduction de la durée de la formation enseignante au primaire

Publié 21 février 2024 Mis à jour 21 février 2024

Non à la réduction de la formation enseignante ! La société pédagogique genevoise (SPG), avec d’autres syndicats, a appelé à voter pour le référendum contre la loi réduisant de quatre à trois ans la formation des enseignant·e·s du primaire votée par la majorité de droite au Grand Conseil, l'organe législatif du canton de Genève.

L’assemblée générale extraordinaire de la SPG du 14 février a adopté une Résolution réaffirmant que « l’enseignement durant les premières années du cursus scolaire requiert un très haut niveau d’études et de formation des enseignant·es aux regards des enjeux qu’elles constituent pour l’élève. Par ailleurs, seul le principe de la polyvalence intercycle assure la prévention de certaines difficultés d’apprentissage et une progression cohérente au fil des huit années que compte la scolarité primaire. »

L’Assemblée générale extraordinaire a donc décidé de :

  1. Soutenir le référendum lancé par la SPG contre la loi 11926 ;
  2. Organiser une mobilisation pour sensibiliser sur les besoins de formation ;
  3. Étudier le lancement d’une initiative pour une formation au niveau maitrise ; et
  4. Soutenir activement un renforcement de la formation continue sur temps scolaire (4 jours).

Elle a également fait part de sa détermination à récolter les signatures requises pour faire aboutir le référendum dans le délai référendaire imparti et d’engager par la suite les ressources nécessaires pour gagner la votation populaire dans les urnes.

La SPG a lancé le référendum le 13 février lors d’une conférence de presse, à côté de représentant∙e∙s des autres niveaux d'enseignement, du Syndicat des enseignants romands (SER) – membre de l’Internationale de l’Éducation (IE), des partis de gauche, ainsi que de représentant∙e∙s des étudiant∙e∙s de l'Institut universitaire de formation pour l'enseignement (IUFE) et de leurs formateur∙trice∙s.

Cinq raisons pour signer le référendum

Le syndicat a mis en avant cinq raisons pour signer ce référendum :

  1. Les enseignant·e∙s mieux formé·e∙s restent plus longtemps dans le métier ;
  2. Plus les enseignant·e∙s sont formé·e∙s, mieux les élèves réussissent ;
  3. La Suisse ne doit pas rester isolée ; tous les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) proposent une formation initiale de 4 ans minimum ;
  4. Les besoins des élèves augmentent, les besoins en formation des enseignant·e∙s aussi ; et
  5. Une formation rabotée de 25% pour des enseignant·e∙s 25% moins performant·e∙s ?

Plus les enseignant·es sont formé·es, mieux les élèves réussissent

Francesca Marchesini, présidente de la SPG, a défendu le « haut degré d'expertise » de la formation universitaire genevoise qui permet de « rester longtemps dans le métier », tout en affirmant que, « plus un enseignant est formé, mieux les élèves réussissent ».

Selon les référendaires, il y aura moins de formation pratique (Genève étant le canton qui confronte le plus ses étudiant∙e∙s aux réalités du terrain), tandis que les matières théoriques enseignées découlent d'une exigence au niveau fédéral pour la reconnaissance de la formation (des matières qui sont aussi inculquées dans les autres cantons).

Même si le Grand Conseil a voté une formation en trois ans permettant de continuer à enseigner au primaire, ce n'est pas réaliste, ont aussi prévenu les référendaires. Selon eux∙elles, les étudiant∙e∙s devront se spécialiser pour enseigner soit chez les petits, soit chez les grands, ou faire un complément d'études optionnel pour devenir généralistes.

Le président du Syndicat des enseignants romands (SER), une organisation membre de l’Internationale de l’Éducation dont la SPG est membre, David Rey, a lui tenu à apporter le « total soutien » de son syndicat au référendum, en ajoutant qu’il est important que les enseignant∙e∙s soient des généralistes.

Être généraliste permet une mobilité professionnelle salutaire pour les enseignant∙e∙s et est très pratique pour l'employeur, a par ailleurs indiqué Marchesini. Et même si une faible proportion d'enseignant∙e∙s changent de division scolaire, pour elle, ce sont probablement « autant de burn-out évités » et, « surtout, cette vision globale de la scolarité primaire des élèves est très importante sur le plan pédagogique. »

Une formation de haut niveau adaptée aux enjeux sociétaux actuels

La SPG, comme le SER et le Dachverband Lehrerinnen und Lehrer Schweiz (LCH) qui regroupe les enseignant∙e∙s en Suisse alémanique et est aussi affilié à l’Internationale de l’Éducation, prône depuis plus de 20 ans une formation au niveau maîtrise – quatre ans - pour l’ensemble des enseignant·e∙s de la scolarité obligatoire. Le comité référendaire appelle les citoyen·ne∙s à soutenir la revendication d’une formation élevée et exigeante pour les enseignant∙e∙s du primaire.

La Résolution sur la formation des enseignants adoptée lors de l’Assemblée des délégué∙e∙s du SER du 1er décembre 2018 rappelle notamment qu’il est « absolument nécessaire de mettre en place une formation de généraliste d’un volume équivalent à celui d’un master. Cette augmentation du volume de la formation est nécessaire pour des formations initiales complètes, répondant pleinement aux réalités du métier et en adéquation avec les exigences du terrain. Cette revendication est posée pour garantir la qualité du système éducatif sur le moyen et long terme. »

Cette Assemblée a aussi souligné qu’elle « s’opposera à l’idée d’une profession qui se construirait sur la multiplication des formations complémentaires ».

Une formation moins chère et plus alignée avec les pays de l’OCDE

La formation initiale actuelle du corps enseignant du primaire se trouve être de très loin la moins chère de Suisse, a aussi expliqué la SPG. En effet, le coût de l’ensemble du cursus en quatre ans se situe en-dessous de la moyenne suisse, calculée sur trois ans. Ainsi, l’abrogation d’une année d’études non seulement ne permettrait aucune économie tangible au niveau cantonal, mais induirait au contraire des frais supplémentaires pour compenser à travers la formation continue le manque induit par la réduction de la formation initiale.

Également, si Genève reste le seul canton suisse à proposer une formation d’une durée de quatre ans, sur le plan international, il est loin d’être marginale. Dans les pays de l’OCDE, toutes les formations durent désormais au moins quatre ans. Le Québec propose une formation universitaire de quatre ans, l’Allemagne, la France et l’Italie exigent une formation de cinq ans (niveau Master). La Suisse, à l’exception de Genève, est donc le dernier pays d’Europe qui forme ses enseignant·e∙s du primaire en trois ans.

Campagne « La force du public : ensemble on fait école ! »

L’Internationale de l’Éducation soutient les revendications des enseignant∙e∙s syndicalistes genevois∙e∙s, revendications qui sont en droite ligne avec celles de sa campagne « La force du public : ensemble on fait école ! ».

Cette campagne se veut un appel urgent aux gouvernements pour qu'ils investissent dans l’enseignement public, un droit humain fondamental et un bien public, et qu'ils investissent davantage dans les enseignant·e·s, le facteur le plus important pour parvenir à une éducation de qualité. Cela signifie garantir l’application du droit du travail et assurer de bonnes conditions de travail, ainsi que des charges de travail gérables et des salaires compétitifs pour les enseignant·e·s et les travailleur·euse·s de l'éducation.