L’éducation des Roms: une lente marche vers l’intégration
Nous [les enseignants] pouvons commencer. J’espère que nous sommes assez intelligents pour comprendre que quelqu’un doit faire le premier pas pour rien. Pareil pour le deuxième pas. Et peut-être qu’après dix pas, je pourrai attendre quelque chose des enfants gitans et des familles gitanes. Parce que j’ose espérer que nous, les enseignants, sommes intelligents! Si nous ne faisons pas ça, c’est que nous ne sommes pas malins.
– Enseignant du primaire à Timisoara, Roumanie
Ces dernières années, la réduction de la discrimination et la prévention de l’exclusion des communautés roms ont été à l’ordre du jour de nombreux pays européens. En dépit de l’existence de nombreux programmes relatifs à l’intégration des Roms, l’Union européenne est incapable d’influencer les gouvernements dans des domaines cruciaux: le marché du travail, les institutions sociales, les soins de santé et l’éducation, où la discrimination et l’exclusion structurelle continuent à laisser les Roms dans la pauvreté. Le Sommet européen sur les Roms, qui a eu lieu à Bruxelles en septembre, a soulevé bon nombre de critiques de la part de certains Etats membres.
Bien que la Cour européenne des Droits de l’Homme ait déclaré l’année dernière que la ségrégation des étudiants roms dans des écoles « spéciales » pour enfants ayant des difficultés d’apprentissage est une forme de discrimination illégale, les gouvernements et les systèmes éducatifs ont réagi avec beaucoup de lenteur pour abolir les pratiques de ségrégation des enfants roms. Des schémas de discrimination se reproduisent toujours dans les systèmes éducatifs conventionnels d’Europe centrale et occidentale, et la fréquentation scolaire des enfants roms reste faible.
La ségrégation n’a pas seulement lieu au niveau de l’école. Alors que les enfants roms fréquentent souvent des écoles réservées à leur communauté ou sont inscrits dans des écoles spéciales, la ségrégation existe également dans les écoles de l’enseignement général: entre les classes, et également au sein même de la classe. Il arrive que des enfants roms soient placés au fond des classes et ignorés par leurs enseignants. Ceux-ci se sentent peut-être perdus quant à la façon d’enseigner à des étudiants roms. Il se peut que des enseignants ne soient pas conscients des besoins des enfants de leur classe, parce qu’ils n’ont pas été formés en matière de perspectives interculturelles. En raison d’un manque de représentation dans les livres scolaires ou les discussions de classes, de nombreux enfants roms sont incapables de s’identifier ou de voir leur réalité reflétée dans l’expérience scolaire.
La discrimination dans l’éducation, ou dans toute autre sphère sociale, ne peut être résolue par des programmes « miracles ». Tout effort est sans doute mieux que rien, mais un projet à court terme ou un cours intensif après l’autre ne rencontreront probablement pas l’enthousiasme des enseignants ou des étudiants. Un changement réel ne peut se produire que par le biais d’une transformation structurelle de systèmes éducatifs complets, afin de faire place à la diversité. Tous doivent être impliqués: les syndicats d’enseignants, les programmes de formation des enseignants, le programme scolaire, les autorités locales et les ministres de l’Education, et, bien sûr, les communautés roms elles-mêmes.
Il est clair que les enseignants ont un rôle crucial à jouer pour mettre en œuvre des pratiques éducatives inclusives et pour encourager les relations réciproques de tolérance et de respect entre les enfants en classe et dans la communauté. Il est important que leur voix soit entendue et qu’ils reçoivent le soutien et la formation interculturelle dont ils ont besoin pour relever le défi de la diversité dans leurs classes.
L’insertion de médiateurs scolaires roms peut aider à encourager les parents roms à envoyer leurs enfants à l’école et à tenir les enseignants informés de la situation familiale des étudiants roms.
Cependant, les enseignements ne peuvent, à eux seuls, mettre fin à la discrimination. Les Roms continuent à être confrontés à des privations et à des inégalités multiples en matière de chômage, de piètre qualité de logement, de manque d’accès aux services sociaux et de faible influence politique. Le seul moyen de faire face à ces problèmes consiste à mettre en œuvre des politiques communes qui régissent des domaines très liés entre eux : social, politique, économique et culturel. Par Mireille de Koning. Mireille est assistante professionnelle de l’IE à l'Unité Recherche.