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Internationale de l'Education
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France: La condition enseignante, longtemps détériorée, en voie d’amélioration?

Publié 16 novembre 2012 Mis à jour 27 novembre 2012

La condition enseignante s’est fortement dégradée en France au cours des dix dernières années. Cette détérioration s’est particulièrement accélérée durant la Présidence de Nicolas Sarkozy. Au lieu d’être considérée comme un investissement nécessaire pour la collectivité, le système éducatif a été présenté comme un fardeau coûteux.

Ainsi, durant cette période, les postes d’enseignant(e)s ont été considérés comme un des principaux gisements d’économies budgétaires. De 2007 à 2012, ce sont 80.000 emplois d’enseignants qui ont été supprimés en France, alors que dans le même temps le nombre des élèves est resté quasiment stable.

Les dégâts de la conception libérale de l’Education

Cette réduction massive du nombre d’enseignant(e)s s’est aussi accompagnée d’un changement dans la conception même de ce que doit être l’Education. Jusque là, quelques soient les alternances politiques, elle était considérée comme un droit universel. A ce titre, elle devait être accessible à tou(te)s les jeunes, quelques soient leurs origines, et pour ce faire relevait du service public, c'est-à-dire de la responsabilité de l’Etat. En 2007, est apparue une nouvelle conception libérale et managériale de l’Ecole. Ce modèle a essayé de calquer le fonctionnement du système éducatif sur celui du monde de l’entreprise: concurrence, rentabilité, évaluations… oubliant que l’Education ne peut pas être assimilée à un bien marchand.

Ce changement de modèle s’est aussi accompagné, à la fois pour des raisons idéologiques et budgétaires, par une destruction de la formation initiale professionnelle des enseignant(e)s. Dans le même temps, les dispositifs d’aides spécialisées destinées aux élèves en grande difficulté ont été en très grande partie supprimés dans les écoles primaires.

Par ailleurs, les rapports entre les enseignant(e)s et leur hiérarchie se sont tendus. Cette situation étant liée à la dégradation des conditions d’enseignement, mais aussi à un modèle de gestion des ressources humaines fortement injonctif.

Changement d’attitude envers les enseignant(e)s

Non seulement les conditions de travail se sont fortement dégradées, mais le respect et la considération pour les enseignant(e)s était globalement absent des discours de la majorité politique aux affaires. Leur professionnalité était niée et ils étaient au fond considérés, non comme des pédagogues, mais comme de simples exécutant(e)s d’une politique éducative pour le moins très contestable. Cette période aura été pour le SE-UNSA, syndicat du primaire et du secondaire, une succession de multiples combats syndicaux pour tenter d’infléchir une politique allant à rebours de l’intérêt des élèves comme de leurs enseignant(e)s.

A ce mal-être professionnel des personnels, est aussi venu s’ajouter un sentiment justifié de déclassement social. Contrairement à ce qui avait été annoncé dans la campagne présidentielle de 2007, les suppressions d’emplois n’ont pas servi à mieux rémunérer les enseignant(e)s. Au contraire, leur pouvoir d’achat à baissé et la revalorisation attendue n’est pas venue, alors même que l’Organisation de Coopération et Développement Economiques reconnait que les salaires des enseignant(e)s français(es) sont parmi les plus faibles des pays qu’elle regroupe.

Dégradation passée contre considération actuelle de la profession enseignante

Cette dégradation des conditions de travail, de la formation initiale, de l’image sociale du métier d’enseignant(e) et la faible rémunération consentie ont aujourd’hui pour conséquence une désaffection des étudiant(e)s pour le métier d’enseignant(e). Depuis deux ans, les concours pour devenir professeur(e) du second degré n’attirent plus et de nombreux emplois restent vacants. Cette situation devient particulièrement inquiétante.

Une nouvelle majorité vient d’arriver au pouvoir dans notre pays avec un projet éducatif radicalement différent. D’ores et déjà, la considération due aux enseignant(e)s se retrouve largement exprimée. C’est important, mais cela ne suffira pas. La question des salaires reste posée. Enfin, la nécessaire association des personnels aux différentes réformes annoncées est indispensable. En France, comme ailleurs, les enseignant(e)s ne peuvent pas être considéré(e)s comme de simples exécutant(e)s des politiques éducatives. Ce sont des concepteurs/trices, des pédagogues, des personnels qui ne ménagent ni leur énergie ni leur temps pour leurs élèves. Une société qui respecte ses enseignant(e)s et son école est une société qui prépare convenablement son avenir.

Par Christian Chevalier, Secrétaire général du Syndicat des Enseignants (SE), affilié à l’Union nationale des syndicats autonomes-Education (UNSA-Education/France)