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Mondes de l'éducation

Voix de l’éducation | Les leçons de la DANA à Valence et un appel urgent à enseigner pour la planète

Publié 29 novembre 2024 Mis à jour 2 décembre 2024
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Les pluies torrentielles et les inondations dévastatrices qui ont frappé plusieurs régions d’Espagne en octobre 2024, plongeant sous les eaux plus de 100 municipalités dans la province de Valence, démontrent une fois de plus l’impact indéniable du changement climatique sur nos sociétés.

Des milliers d’élèves, d’enseignantes et d’enseignants et de familles sont aujourd’hui aux prises avec les conséquences tragiques du phénomène météorologique DANA qui, bien qu’il ne soit pas nouveau, a atteint une intensité et une capacité destructrice sans précédent.

Avec près de 50.000 élèves touché·es, dont 11.000 n’ont toujours pas repris les cours un mois après la catastrophe, et une communauté éducative débordée par les efforts de reconstruction, la crise a directement affecté le droit à l’éducation, exigeant des réponses urgentes et coordonnées.

Dans sa déclaration à la récente Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP29), l’Internationale de l’Éducation (IE) a souligné que la crise climatique représente « la plus grande menace à laquelle sont confrontées l’humanité et notre planète ». À cet égard, l’IE a mis l’accent sur la nécessité urgente d’intégrer l’éducation au changement climatique dans les programmes éducatifs, en tant que mesure indispensable pour préparer les nouvelles générations à faire face à ce défi existentiel.

Dans cette interview pour Mondes de l'éducation, Marc Candela, coordinateur de l’action syndicale du Sindicato de Trabajadores de la Enseñanza del País Valenciano (STEPV) évoque l’impact dévastateur de la DANA sur sa communauté éducative, les réponses adoptées et les demandes urgentes formulées par le syndicat afin de garantir le droit à l’éducation dans un contexte d’urgence climatique inédit.

Mondes de l'éducation: Quelle est l’ampleur actuelle des répercussions de la DANA sur les élèves et les écoles touché·es ?

Depuis le 11 novembre, les élèves de 93 établissements scolaires situés dans les zones touchées par les inondations ont pu reprendre les cours. Un mois après la catastrophe, il reste cependant 10.977 élèves non scolarisé·es et 22 écoles fermées, ce qui témoigne de l’ampleur des défis à relever pour rétablir la normalité dans le domaine de l’éducation.

Etablissement scolaire à Catarroja

Mondes de l'éducation: Quelles sont les mesures prises pour s’assurer que ces élèves ne sont pas laissé·es pour compte ?

Il s’agit avant tout de veiller à garantir la scolarisation de l’ensemble des élèves. La Conselleria de Educación (ministère de l’Éducation régional), en tant qu’instance responsable de la gestion de l’éducation au niveau régional, a diffusé des circulaires aux établissements scolaires leur conseillant d’organiser des cours en ligne pendant que les installations sont remises en état et que les élèves des écoles totalement détruites sont placé·es dans d’autres établissements. Des mesures spécifiques ont également été annoncées pour les élèves qui effectuent leur dernière année de scolarité dans l’enseignement secondaire, en vue des examens d’entrée à l’université.

Etablissement scolaire à Catarroja

Mondes de l'éducation: De quelle manière les enseignantes et les enseignants ont été affecté·es ?

La situation varie considérablement. La DANA a touché quatre régions ou « comarques » et plus de 100 écoles de la communauté de Valence. Il y a des enseignantes et des enseignants qui ont tout perdu et nous avons déploré la mort d’un directeur d’école secondaire à Cheste. Il y a des enseignantes et des enseignants qui vivent et travaillent dans la zone sinistrée, alors que d’autres y vivent mais travaillent dans des zones non touchées, et vice versa. Il y a aussi celles et ceux qui ne sont plus en mesure de se déplacer, ayant perdu leur véhicule et compte tenu du fait que les transports publics n’ont pas encore été totalement rétablis. Les personnels enseignants touchés, directement ou indirectement, bénéficient d’un congé rémunéré leur permettant de s’absenter de leur poste dans les établissements non affectés.

Mondes de l'éducation: Quelles mesures immédiates le syndicat demande-t-il au gouvernement central et aux gouvernements autonomes de prendre pour soutenir les personnels enseignants et les élèves dans cette crise ?

Le premier défi consiste à remettre les écoles en état et à rétablir la normalité pour les élèves. Certains établissements doivent être entièrement reconstruits et les élèves sont placé·es dans des « établissements d’accueil ». Bien que le gouvernement de Valence y travaille, nous critiquons sa gestion, car le nettoyage des écoles a été laissé à la communauté éducative, sans soutien suffisant. Depuis les rangs du syndicat, nous avons exigé du ministère de l’Éducation régional un plan de choc ainsi qu’un plan de reconstruction des écoles sinistrées. Nous demandons au gouvernement espagnol de prolonger les délais de participation au processus de mutation, étant donné que le personnel enseignant concerné ne sera pas en mesure de participer si les délais ne sont pas prolongés.

"Ecoles sans boue", manifestation du 23 novembre 2024

Mondes de l'éducation: Comment le syndicat évalue-t-il la réponse du gouvernement régional face à la crise climatique ?

Le syndicat a qualifié la réponse du ministère de l’Éducation régional de Valence et d’autres administrations de lente, insuffisante et mal coordonnée. Parmi les exemples évidents de ces déficiences, on peut citer la lenteur des interventions, l’absence de plans de prévention et l’insuffisance des ressources, qui ont non seulement entravé la remise en état des écoles, mais ont également entraîné des tragédies telles que la mort accidentelle d’un agent et la blessure grave d’un autre au cours des travaux de déblaiement.

Il a également été souligné que la gestion institutionnelle a échoué dans des domaines clés tels que la certification de la désinfection, notamment dans des établissements déjà opérationnels, la communication avec les communautés éducatives et l’absence de soutien psychologique pour les personnels et les familles touché·es.

Face à ces lacunes, le rôle des bénévoles, composés d’enseignantes et d’enseignants, de familles et de communautés locales, s’est avéré essentiel. Leur mobilisation massive a permis de s’atteler à des tâches critiques telles que le déblaiement initial des centres, la réorganisation des espaces et le soutien logistique. Le syndicat rappelle toutefois que cette solidarité, bien qu’exemplaire, ne peut et ne doit pas se substituer à la responsabilité des pouvoirs publics, qui ont le devoir de garantir des ressources, ainsi qu’une réponse prompte et coordonnée dans les situations d’urgence à venir.

Mondes de l'éducation: Considérez-vous important d’intégrer l’éducation au changement climatique dans les programmes scolaires pour sensibiliser et informer la population ?

Oui, et pour cause. En avril 2024, l’Intersindical Valenciana, à laquelle est affilié le STEPV, a lancé une campagne qui comprend un ensemble de dix principes pour des « lieux de travail durables », qui appelle à l’inclusion d’une telle formation dans les programmes d’études. Nous savons que les écoles sont très sensibilisées à la question et travaillent de manière transversale avec les élèves, cependant il est nécessaire d’insister sur cette formation dans toutes les disciplines du programme.

Pour en savoir plus de la campagne mondiale de la IE «Enseignez pour la planète» , cliquez ici

Le contenu et les avis exprimés dans ce blog sont ceux de son auteur et ne reflètent pas nécessairement la position officielle de l’Internationale de l’Education.